Le lecteur du Canadien appris dans l’édition du 11 juillet 1887 que deux jours auparavant, M. Alexandre Guay et deux autres personnes avaient trouvé le corps d’une noyée en bas du petit quai chez Gilmour. La victime est décrite ainsi:
Le corps est celui d’une femme d’une vingtaine d’années […]. Elle porte une longue chevelure blonde et est vêtue d’une robe bleue marine garnie en velours, un jupon bleu carré jaune, un pantalon de coton blanc, des bas noirs et des bottines lacées.
Qui est cette dame?
L’édition du lendemain nous apprend qu’il s’agirait d’Anne Leslie, arrivée à Lévis le 7 juillet 1887 à bord du Grecian, en provenance d’Edimbourg, Écosse. On dit que la demoiselle est âgée de 28 ans et qu’elle devait visiter des amis à Montréal, puis se diriger vers Petrolia, en Ontario, où un emploi l’attendait.
Il appert d’après les témoins entendus hier, qu’on a vu cette fille à St-Joseph de Lévis, vers cinq heures vendredi après-midi. Elle demanda à quelqu’un s’il y avait des habitations sur la grève, et ayant reçu une réponse négative, elle s’y achemina, en se cachant la figure lorsqu’elle rencontrait quelqu’un.
Le 13 juillet 1887, toujours dans Le Canadien, on en apprend un peu plus sur les circonstances de son décès.
LE MYSTERE DE LEVIS
Mlle Grant, qui a amené au Canada les immigrantes dont faisait partie Anna Leslie, qui a été trouvée noyée à St. Joseph de Lévis samedi dernier, est arrivé hier matin de Montréal et a identifié le cadavre qui est à la Morgue comme étant celui de la malheureuse fille Leslie.
L’enquête sera reprise cet après-midi.
On rapporte que vendredi soir, vers la fin du jour, une personne à mystérieuse apparence, à démarche chancelante, qui paraissait être une jeune femme, attirait à Lévis les regards de tous les passants. Elle parcourit les différentes rues de cette ville, les yeux baissés, presque fermés et portant dans sa main un petit paquet enveloppé dans un mouchoir blanc. Plusieurs personnes l’ont entendue sangloter et pleurer, elle a été vue vers 7 1/2 heures sur la rue Wolf. Lorsqu’elle fut rendue à l’extrémité-Est de cette rue, elle prit la direction du Collège, elle aurait dit quelques paroles à quelques-uns des messieurs de cette maison et que ceux-ci l’ayant congédiée elle serait partie en sanglotant.
Elle disparut ensuite et on ignore la direction qu’elle prit.
Cette personne était sans aucun doute Anne Leslie.
Quelques personnes ayant en leur possession des effets appartenant à la défunte et ne voulant pas les remettre, le coroner a chargé le détective Fleury d’opérer leur arrestation.
Comme nous l’avons déjà rapporté, l’autopsie a prouvé qu’aucun attentat n’avait été commis sur cette personne, et l’on ne saura jamais si elle s’est suicidée dans un accès de désespoir d’avoir été abandonnée, ou si elle est tombée accidentellement en bas du quai Gilmour. Le Canadien, 14 juillet 1887
Sans surprise, le coroner A.-G. Belleau rendit un verdict de noyade dans le fleuve.
Selon la base de données des enquêtes des coroners de BANQ, Anne (Anna) Leslie habitait le Banffshire, en Écosse et était âgée de 26 ans.
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