
Richard Montgomery (1738-1775). Extrait de Canada, the empire of the North par Agnes Christina Laut, p. 301. Source: Wikipédia
After resting in peace for forty-two years within the walls and under the sod of this garrison, the skeleton of General Montgomery who fell in an assault on the Lower-Town, on the 31st of December, 1775, was, on Saturday last, raised from the place of it’s deposit and took its departure for New-York; where is is destitued to a more distingues place of interment in the church of St. Paul of that city. Extrait du Quebec Mercury, 23 juin 1818.
En 1818, les restes du général Richard Montgomery furent transférés à l’église St. Paul de New York. Il avait perdu la vie le 31 décembre 1775 alors qu’il tentait, avec ses troupes, de pénétrer dans la ville de Québec (Pour en savoir plus, Invasion américaine de 1775-1776). Philippe Aubert de Gaspé, dans ses Mémoires, raconte comment la nouvelle du décès de Montgomery a été reçue à Québec. Il raconte aussi ce qui arriva au chien de Montgomery.
L’hospice de l’Hôpital-Général, situé hors des murs de la cité de Québec, et protégé, du consetement du général anglais, Lord Dorchester, par le drapeau noir, servait d’asile, en 1775, pendant le siège de Québec, aux malades et aux blessés de l’armée américaine commandée par le général Montgomery. L’abbé de Rigaudville passant dans les salles, le matin du premier janvier, entend des lamentations dont il ne peut deviner la cause, en comprenant pas un mot de la langue anglaise. Les Américains élévaient les mains au ciel en criant: »Montgomery is dead! » L’abbé comprenait parfaitement que Montgomery voulait bien dire Montgomery leur général mais là s’arrêtait toute sa science. Supposant, avec raison, que la nouvelle que l’on venait de communiquer aux Américains n’avait rien de flatteur pour eux, mais qu’elle devait nous être favorable, il s’empresse de raconter à la supérieure et aux religieuses du couvent les paroles qu’il a entendues. Mais les pauvres religieuses sont aussi empêchées que les magiciens de Balthasar à la vue des caractères tracés sur les murs de la salle de festin. On répétait sur tous les tons »Montgomery is dead » sans en être plus avancé lorsque mademoiselle Desgoutins, jeunes acadienne de Louisbourg, qui demeurait dans l’hospice, les tira d’embarras en leur apprenant que dead voulait dire mort, et que ce mot appliqué à Montgomery annonçait l’heureuse nouvelle que le général américain était passé de vie à trépas. Mais comme les religieuses n’étaient pas les plus fortes chez elles, elles se donnèrent bien de garde d’en témoigner de la joie; au contraire tout le monde feignit d’être très sensible à cette perte, en répétant, d’un accent pitoyable, avec nos ennemis; »poor Montgomery is dead! ».
Que ceux qui désirent connaître où le corps de Montgomery fut transporté après avoir reçu le coup de mort en montant à l’assaut de la ville de Québec, le 31 décembre, 1775, s’arrêtent dans la rue Saint-Louis, vis-à-vis une très petite maison appartenant à cette époque à la veuve Gobert [maison de Louis Gobert, charpentier], et portant aujourd’hui le N. 44. C’est là qu’il fut déposé. Que le visiteur continue sa promenace jusqu’à la porte de la ville, s’il est curieux de savoir où il fut enterré, qu’il compte cent pas en se dirigeant vers la citadelle, que là, il se tourne du côté des murs de la ville, et il sera à quelques pieds du lieu où Montgomery a reposé jusque vers l’année 1825 [en fait 1818] que son corps fut remis à sa famille par les autorités d’alors. Il ne reste plus aujourd’hui au Canada que le souvenir de sa défaite et son épée maintenant entre les mains de monsieur l’assistant-commissaire-général Thompson, auquel son père, un des défenseurs de Québec, l’a remise en mourant.Extrait de Quebec ancient and modern [microform] : being a collection of notes for tourists (1891) par E. T. D. Chambers p.39
Québec – Quartier Cap-Blanc – Boulevard Champlain – Plaque commémorative sur la chute de Montgomery (1775) . – janvier 1905 par Fred C. Würtele (à droite). William Wood est l’homme à gauche. Source: BANQ
Le rebelle Montgomery reposait depuis trois jours dans sa tombe, peu regretté des Anglais qu’il avait trahis, et encore moins des Canadiens-français, dont il avait incendié les paisibles habitations en 1759, lorsqu’il servait sous le général Wolfe [Selon Pierre-Georges Roy, Philippe Aubert de Gaspé confond plutôt Richard avec son frère Alexandre Réf.). Déjà peut-être il était oublié de ceux qui avaient été naguère ses amis, lorsqu’on s’aperçut qu’un seul et dernier ami, le plus fidèle quoique privé de la raison, ne l’avait pas abandonné.
Quelqu’un information mon oncle Charles de Lanaudière, aide-de-camp de Lord Dorchester, qu’un superbe chien de la grande race des épagneuls était couché, depuis trois jours, sur le sépulcre de Montgomery, et qu’il grattait la terre avec ses pattes en poussant des hurlements plaintifs et doulouteux, quand une personne en approchait.
[….]
Lorsque monsieur de Lanaudière arriva sur les lieux, le chien était accroupi sur le sol, la tête tournée du côté des assistants qu’il regardait avec méfiance, mais sans colère. Mon oncle lui dit quelques paroles d’une voix affectueuse en langue anglaise et prononça le nom de Montgomery. Le pauvre animal fut assitôt debout, et poussa un hurlement plaintif en le regardant avec tristesse. M. de Lanaudière s’approcha de lui d’un air caressant, et lui présentant de l’eau et du pain. Le chien but quelques gorgées d’eau à la hâte et se coucha sur la tombe de son maître, sans vouloir prendre d’autres nourritures. Bref, ce ne fut qu’à l’expiration d’une huitaine de jours, que M. de Lanaudière réussit, à force de soins, de caresses, et en lui donnant à boire et à manger lui-même, à l’arracher du sépulcre de son maître.
Montgomery, (ce fut le nouveau nom qu’on lui donna,) devint bien vite le favori de la famille de son bienfaiteur, sur laquelle il finit par reporter toute son affection. Six à sept mois après, mon oncle laissant Québec avec sa famille pour sa seigneurie de Sainte-Anne de La Pérade, donna l’ordre à ses domestiques de tenir le chien renfermée pendant une couple de jours.Soit négligence, soit adresse de la part de l’animal, Montgomery recouvra la liberté le soir même. Douze heures environ s’étaient écoulées depuis le départ de son maître. Le lendemain, vers quatre ou cinq heures du matin, ma tante réveillée par les aboiements d’un chien, dit à son mari: »J’entends la voix de Montgomery. »
Lorsque monsieur de Lanaudière arriva sur les lieux, le chien était accroupi sur le sol, la tête tournée du côté des assistants qu’il regardait avec méfiance, mais sans colère. Mon oncle lui dit quelques paroles d’une voix affectueuse en langue anglaise et prononça le nom de Montgomery. Le pauvre animal fut assitôt debout, et poussa un hurlement plaintif en le regardant avec tristesse. M. de Lanaudière s’approcha
– Tu rêves, Babet ! (Elizabeth) lui dit son époux; le chien n’est jamais venu ici avec nous auparavant, il est impossible qu’il ait deviné la route que nous avons prise.Mais c’était bien Montgomery qui avait suivi, l’espace de vingt-deux lieues, pendant la nuit, la piste des chevaux de son maître parti vers les six heures du matin.
Extrait des Mémoires de Philippe Aubert de Gaspé, 1866, p. 38 à 42.
Bibliographie
Pierre-Georges Roy. A travers les mémoires de Philippe-Aubert de Gaspé. G. Ducharme, Montréal, 1943, 296 pages.
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