Des nouvelles d’une paroisse de colonisation: Saint-Zacharie de Metgermette [1881]

Ce matin, nous voyageons en 1881 en Beauce, plus précisément à Saint-Zacharie, en compagnie de Jules-Paul Tardivel. La paroisse est jeune et Tardivel veut convaincre les colons de venir s’établir à Saint-Zacharie. Voici le récit de sa visite, publié dans le Canadien du 20 juin 1881.

LA COLONISATION

__
Saint-Zacharie de Metgermette

Monsieur le rédacteur du Canadien,

J’arrive de Saint-Zacharie de Metgermette, et je m’imagine que vos lecteurs seront bien aisés d’avoir quelques renseignements sur cette nouvelle paroisse.

On croit assez généralement, si je ne me trompe pas, que le canton de Metgermette est situé au milieu des montagnes, qu’il est fort pittoresque, mais très rocailleux, et, par conséquent, peu propre à la colonisation. C’est l’idée que je m’étais faite de cet endroit, et j’ai tout lieu de croire que cette idée est partagée par un grand nombre de personnes. C’est là une très grave erreur qu’il importe de dissiper. Pour connaître un canton il ne suffit pas d’en parcourir un petit coin. Il faut s’enfoncer dans la forêt et visiter un  »township » rang par rang, lot par lot, si l’on veut être en état de juger de l’ensemble de la localité.

C’est ce que j’ai fait ces jours-ci, et je puis vous assurer que le canton de Metgermette renferme une très grande quantité de belles terres.

Mgr l’Archevêque, qui a pris à coeur la belle oeuvre e la colonisation, vient d’ériger Metgermette en paroisse sous le vocable de Saint-Zacharie. Saint-Zacharie est le patron du R.P. Lacasse, et sa Grandeur, en donnant ce nnom au nouvel établissement, a sans doute voulu rendre hommage au zèle et au dévouement du R. Père.

Sa Grandeur, comprenant que la colonisation ne saurait avoir quelques chances de succès sans l’appui du clergé, sachant que nos Canadiens n’iront pas s’enfoncer dans la forêt s’ils n’ont la certitude d’y trouver une chapelle et un prêtre, n’a pas voulu laisser la colonie de Metgermette plus longtemps sans pasteur; Elle a nommé M. Meunier, ci-devant vicaire de Sainte-Marie de la Beauce, à la cure de Saint-Zacharie.

Mercredi dernier, M. Meunier partait de Saint-Georges pour prendre possession, en bonne et due forme, de sa nouvelle paroisse. Le R. P. Lacasse l’avait précédé la veille.

Jeudi, jour de la Fête-Dieu, le R. P. Lacasse a chanté l a messe dans le moulin construit sur la rivière des Abénaquis, près du lac de ce nom, et près, aussi, de la demeure de M. Vannier. M. le curé Meunier a dit, en quelques mots, l’immense bonheur qu’il éprouvait de se voir au milieu de ses nouveaux paroissiens.

Après la messe, il y a eu procession du Très-Saint-Sacrement. Un des reposoirs avait été préparé devant la maison de M. Vannierr et l’autre, à deux ou trois arpents plus loin.

Environ cent cinquante personnes assistaient à la messe et à la procession. Outre les paroissiens de Saint-Zacharie, déjà assez nombreux, il y avait plusieurs étrangers venus de Sainte-Marie, de Saint-Joseph, de Saint-François, de St-Côme, ainsi que du canton de Watford, établissement voisin de Metgermette qui sera desservi pouur le moment par M. le curé Meunier.

En attendant que la chapelle et le presbytère soient construits, M. Meunier occupera le bas d’une maison près du lac; le haut de cette même maison servira de chapelle.

Les paroissiens de Ste-Marie et de St-Joseph ont généreusement doté cette nouvelle paroisse de tout ce qu’il faut pour le culte; vases sacrés, linge de sacristie, etc. Ces cadeaux ont une valeur de plusieurs cents piastes.

Maintenant que le canton de Metgermette est érigé en paroisse et qu’il y a un prêtre résidant, on verra les colons s’y porter en masse. Déjà il y en a plusieurs de rendus et tous les jours des pères de famille, désirant établir leurs enfants, s’adressent à M. Létourneau, agent des terres à St-Joseph, pour avoir des renseignements touchant ce nouvel établissement.

Il reste encore un nombre considérable de bons lots à prendre, mais je conseillerais à tous ceux qui veulent se trouver dans le voisinage de la chapelle de ne point perdre de temps.

Comme je l’ai déjà dit, les terres de la nouvelle paroisse de St-Zacharie sont excellenttes. Il y a quelques endroits où l’on trouve des roches, mais ces endroits sont rares et d’une étendue peu considérable. Règle générale, le terrain est très bon, bien boisé et bien arrosé. On y remarque beaucoup d’érables sur les côteaux, tandis que dans les fonds, qui sont d’une qualité supérieure, il y a du cèdre en abondance.

Ce canton renferme plusieurs beaux lacs, entre autres le grand lac des Abénaquis, le petit lac des Abénaquis, le grand lac St-Jean, et le petit lac St-Jean, ainsi que plusieurs cours d’eau assez considérables pour alimenter des moulins.

En un mot, Saint-Zacharie a tout ce qu’il faut pour devenir une paroisse très florissante.

Un détail qui fera comprendre, mieux que des phrases, les avantages qu’offre cette paroiosse: Deux jeunes colons ont récolté l’an dernier – ce n’était que leur deuxième récolte – 1,300 minots d’avoine, 150 minots d’orge, 40 minots de pois, des patates, etc. C’est à dire que la deuxième année, ils avaient du graind à vendre!

Il manque cependant quelques chose à Saint-Zacharie, c’est la poste. Les braves gens de cette paroisse sont obligés de descendre à Saint-Georges pour avoir leurs lettres et leurs journaux. M. le curé Meunier a écrit immédiatement, à qui de droit, pour demander un courrier deux fois par semaine, et il faut espérer que le gouvernement accordera sa très légitime demande.

Je n’entrerai pas aujourd’hui dans de plus longs détails. Ces quelques lignes suffiront, j’en suis certain, pour convaincre vos lecteurs que l’oeuvre de la colonisation marche bien, grâce à l’énergie de ceux qui sont à la tête de ce mouvement patriotiques. Puisse ce beau mouvement ne point se ralentir par suite de l’apathie de nos compatriotes!

J.P. Tardivel (Jules-Paul Tardivel)

Vous pouvez lire:

Aujourd’hui, Saint-Zacharie ressemble à cela.

Billets reliés

La colonisations des Cantons-de-l’Est selon Benjamin Sulte (1899)

Le photographe Alexander Henderson (1831-1913)

5. Ces gens qui ont marqué notre histoire: Arthur Buies

La maladie des sauteurs du Maine

Transmission de la mémoire d’une région par ses aînés: l’exemple des Etchemins (Bellechasse)

Le patrimoine religieux de Sainte-Marie de Beauce

Publicité

Une réflexion au sujet de « Des nouvelles d’une paroisse de colonisation: Saint-Zacharie de Metgermette [1881] »

Les commentaires sont fermés.