Le train fait son apparition au Bas-Canada [1836]

La Minerve, 25 juillet 1836

L’INAUGURATION du pont de M. Lachapelle qui s’est faite mercredi dernier a été suivie, le lendemain, d’une cérémonie non moins imposante, et bien digne d’occuper une place dans les annales de l’histoire. Nous voulons parler de l’ouverture du chemin de fer qui vient d’être achevé entre La Prairie et St. Jean sous l’autorité d’un acte de la législature. C’est à juste titre que nous entendions parler depuis longtemps des avantages qu’offrent ces routes qui sillonnent maintenant le [sic] États-Unis dans toutes les directions. Nous pouvons en apprécier nous-même les heureux résultats. Les personnes qui sont à la tête de cette vaste entreprise ont eu beaucoup de difficile à vaincre, cependant, cette oeuvre gigantique a été couronnée du plus brillant succès.

Estampe | Le premier chemin de fer au Canada, partant de Laprairie, Québec | M20906

Le premier chemin de fer au Canada, partant de Laprairie, Québec

Jeudi, vers dix heures et demie, la barque à vapeur Princesse Victoria est partie de ce porte avec plus de 500 personnes à bord, spécialement invitées par les directeurs, pour être témoins de l’ouverture du chemin. Du nombre se trouvaient lord Gosford, sir George et lady Gipps, sir Charles Grey, M. Elliot, secrétaire de la commission, les officiers de la garnison, L’hon. L. J. Papineau, plusieurs membres de la chambre et du conseil, M. le supérieur du séminaire, le corps mercantil, grand nombre de citoyens de distinction, et quelques étrangers distingués qui se trouvaient alors à Montréal.

Le Steamboat fit le trajet en 50 minutes. Arrivé à Laprairie, les dames et les principaux personnages furent placés dans les deux charts couverts et élégamment décorés, et furent traînés par le locomoteur. Les autres charts furent traînés par des chevaux. Un accident survenu au char qui contient la force locomotive l’empêcha de remorquer les autres charts au nombre de 14 à 15, c’est pourquoi il fallut se servir des chevaux. En peu d’instans les chars qui étaient à la remorque du locomoteur furent hors de vue. Tous les convives arrivèrent à St. Jean vers deux heures où une table splendidement servie les attendait. La colation [sic] qui consistait en viandes froides accompagnées d’excellent vin était servie dans un très grand édifice nouvellement bâti à l’extrémité du chemin de fer. Il était élégamment décoré avec des branches de sapin et des drapeaux.

La première santé fut celle du roi, portée par l’hon. P. M’Gill président de l’association; il prit occasion de parler de la réussite de l’entreprise, et des avantages qui en découleraient. Il fit aussi l’éloge des Canadiens qui presque seuls furent employés à faire ce grand travail.

La seconde santé fut  »le président des États-Unis »,  »la troisième  »lord Gosford et les dames et messieurs présents à cette fête. » Son excellence fit des remerciemens par un discours prononcé avec fermeté et éloquence; elle s’étendit assez au long sur les avantages que la province retirerait de semblables entreprises. Plusieurs autres santés furent portées du nombre desquelles sont celles de M. Lindray l’un des commissaires et M. Casay l’ingénieur qui conduisit les travaux. Une médaille en or lui fut présentée en signe d’approbation de sa conduite.

Après près de deux heures passées très agréablement à table, chacun pensa à reprendre sa place dans les chars. En retournant le locomoteur en prit quatre à sa remorque et fit le trajet en 59 minutes. Les douze autres chars furent trainés par les chevaux comme en allant. Le retour, comme d’usage, fut un peu plus bruyant, la gaité était à son comble. Plusieurs, animés par la réception vraiment cordiale que leur avaient faite les directeurs, d’autres par la fumée du champagne, exalaient leur joie et leur satisfaction de différentes manières. Quelques uns même, (avec la permission de M. Sword qui surveillait le repas) s’étaient munis de quelques bouteilles d’excellent madère afin de se prémunir contre la soif qui les avaient dévoré en allant. Pour signaler le départ  la chanson canadienne fut entonnée de cris de joie et d’acclamations à la façon de nos voyageurs.

Toute la bande joyeuse étant arrivée à bord de la Princesse Victoria le Steamboat laissa le quai, mais à peine les mouvements avaient-ils fait quelques révolutions que le vaisseau s’échoua. Ce ne fut qu’après avoir débarqué une partie des passagers dans une grande berge que le vaisseau fut remis à flot. Il parti avec une telle rapidité que le cable qui amarait la berge au Steamboat se rompit, et laissa cette embarquation bien en arrière, vogant au gré des flots. Il fallut rebrousser chemin pour reprendre les passagers. Dans cette manoeuvre un homme de l’équipage tomba à l’eau, et fut sauvé par son adresse à nage.

Tout ces contre temps causerent une long délai, et après avoir fait environ une demi lieu, le pilote déclara qu’il craignait de descendre jusqu’à Montréal, le temps étant couvert et la brunante étant tombée. Il fallut retourner à Laprairie, où chacun passa la nuit du mieux qu’il put. On ne saurait trop faire l’éloge de l’hospitalité des citoyens du villag [sic] qui vinrent en foule offrir leurs maisons et leurs lits à ceux de leurs amis qui débarquèrent du vaisseau. Le lendemain matin à 6 heures le steamboat debarqua au port de Montréal celles des personnes qui avaient été assez matinales pour s’embarquer à son bord.

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