Des ossements retrouvés à l’Anse au Foulon [1924]

Le 2 décembre 1924, des ouvriers participant aux travaux d’agrandissement et d’amélioration du port de Québec découvrent des ossements. En tout, six squelettes seront déterrés ce jour-là. Le lendemain, on trouve d’autres ossements. S’agit-il de soldats de Wolfe? D’Amérindiens? D’employés d’un dénommé Roach?

Le journal l’Action catholique sollicite alors l’avis de Pierre-George Roy, archiviste de la Province de Québec.

L’Action catholique, 4 décembre 1924

DES OSSEMENTS DES VICTIMES DE L’ÉPIDÉMIE
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M P.-G. ROY, ARCHIVISTE DE LA PROVINCE RAPPELLE L’EPIDEMIE DE 1832 – DES RECHERCHES HISTORIQUES

La découverte d’ossements à l’Anse au Foulon, à la Pointe de Roach, découverte que nous rapportions hier, a fait énoncer bien des théories. Ces ossement sont-ils ceux des soldats de Wolfe? Sont-ce les restes des victimes du bandit Chambers dont la grotte devrait être située près de cet endroit? Ces squelettes sont-ils ceux des marins ou d’employés de M. Roach? Sont-ce les restes de quelques victimes du choléra asiatique de 1832?

M. Pierre-Georges Roy interrogé à ce sujet a émis l’idée que ces ossements doivent appartenir à des victimes du choléra asiatique apporté ici en 1832 par des marins et à cette époque on sait qu’un commerce considérable se faisait dans Champlain. il était mort 3,451 personnes au cours des quelques mois que sévit cette maladie et des cimetières improvisés avaient été établis à quelques endroits. On avait établi un hôpital temporaire à Prés-de-Ville, petit village à l’extrémité du Cap Blanc.

Le fait qu’on a trouvé au dessus de l’endroit où sont retirés les ossements une couche de chaux donne plus de force à la théorie émise par M. Roy.

Les docteurs O’Callaghan et Von Ifland furent chargés de la direction de l’hôpital de Près-de-Ville. Bien entendu, les morts furent nombreux là aussi. Pour les catholiques il y avait le  »cimetière des picotés » près de la rue Hamel. Il y avait aussi le cimetière de Sainte-Famille; il y avait surtout le cimetière St-Louis, à l’endroit où s’élève aujourd’hui le St. Brigid’s Home. Le cimetière St-Louis étant plus éloigné du centre de la ville, on craignait moins d’y faire l’inhumation des victimes de l’épidémie. Quant aux protestants, ils avaient aussi leurs cimetières mais il est presque certain que ceux qui moururent au Cap-Blanc furent enterrés sur les lieux mêmes, à une assez bonne distance naturellement de l’hôpital.

 »On ne se fait pas d’idée de ce que fut cette épidémie » dit M. P-Georges Roy. »Le choléra asiatique avait sévi en Europe durant toute l’année 1831. Dans l’hiver on prit des mesures pour l’éloigner du Canada et le 9 avril 1832 Mgr Panet ordonna des prières publiques à cet effet. Le 9 juin, la rumeur circula qu’un immigré avait succombé dans une pension de la rue Champlain. Le secrétaire du bureau de Santé, un nommé Young, publia un démenti formel à cette nouvelle. Cela n’empêcha pas que le soir de cette même journée il y avait six morts de choléra à Québec. Le 14 juin entre autres victimes, on signalait l’hon. J.-Thomas Taschereau, père du cardinal Taschereau et grand-père du premier ministre actuel. M. Taschereau était allé le matin aux funérailles d’un ami. La maladie le frappa et deux heures plus tard il était mort. Dans la seule journée du 15 juin, il y eut 143 décès par le typhus à Montréal. C’est cette même journée que fut ouvert l’hôpital temporaire de Près de Ville. L’épidémie ne s’arrêta qu’aux premiers jours de décembre, alors que le froid sévissait. Elle avait fait à Québec, en quelques mois, 3,451 victimes sur une population de 20,000 environ. Cette même année, jusqu’au 27 novembre, 52,000 émigrants étaient arrivés dans la vieille capitale. »

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