A quand les liqueurs pures et pas chères? [1921]

L’Autorité, 26 novembre 1921

A QUAND LES LIQUEURS PURES ET PAS CHÈRES?

Des quatre coins de la province arrivent des plaintes sur la fabrication clandestine et la vente frauduleuse des boissons alcooliques. Le curé d’une paroisse du bas du fleuve nous demande si le prix élevé des liqueurs vendues par la régie n’est pas l’explication de cet abus.

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Commission des liqueurs du Québec, rue Peel, Montréal, QC, 1930

Si nos informations sont exactes, et nous avons lieu de croire qu’elles le sont, la régie encaisse approximativement un dollar de profit par bouteille d’alcool vendue au consommateur. Les marques anglaises ou françaises lui coûtent en gros $14,00 par caisse de douze bouteilles. Le fisc fédéral touche un droit d’entrée de $20,00 par caisse (à $10,00 du gallon); le transport et l’assurance maritime coûtent à peu près $2,00 par caisse, et les frais d’administration probablement autant. A ce compte, une caisse de scotch, de cognac ou de gin coûte près de $38,00 à la Commission des liqueurs, et elle réalise $12,00 de profit par la vente au détail. Il est bon de noter que l’on a promis récemment de réduire légèrement cette marge de profit.

Si la régie pouvait être assimilée à un marchand ordinaire, ce pourcentage de profits ne serait pas exorbitant. Toutefois il se trouve que la Commission des liqueurs, qui devait être une bonne mère pour nous, ne l’est guère, car les diminutions qu’on nous promet ne se produisent pas aussi vite qu’on le voudrait.

Lorsque la Commission fut fondée, elle devait nous doter de liqueurs ayant cette double qualité d’être pures et à bon marché. Il suffit de goûter certains vins mis en vente par la Commission des liqueurs pour savoir à quoi s’en tenir sur cette pureté. Quant aux prix, les chiffres plus haut cités en disent assez là-dessus.

Il est évident que c’est du gouvernement fédéral, qui touche plus de $1,60 d’impôt sur la bouteille, qu’il faut attendre la plus forte diminution, et nous espérons que les prochaines élections entameront quelque peu l’influence puritaine à Ottawa.

Mais jusque-là, la Commission, qui se flatte d’un futur surplus de $4,000,000 ne pourrait-elle pas faire quelque chose, et sans prendre trop son temps? La Commission des liqueurs serait malvenue de spéculer sur le peuple de notre province. Ne doit-elle pas être pour nous une bonne mère et non une marâtre?

Sylvio PICO

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