Explosion au chemin de fer de la Baie des Ha! Ha! [14 avril 1910]

Voici une histoire qui illustre bien les risques auxquels s’exposaient les hommes qui ont travaillé à la construction du réseau ferroviaire du Québec.

Nous sommes en 1910. On construit alors le chemin de fer entre Chicoutimi et la Baie des Ha! Ha!

Dans le journal La Patrie du 15 avril 1910, on pouvait lire l’article suivant:

EPOUVANTABLE CATASTROPHE A BAGOTVILLE DE CHICOUTIMI

Les entrepreneurs Stanislas Gagné et O’Brien ainsi que quatre ouvriers sont tués par l’éboulement d’une grande étendue de terre – Plusieurs blessés

Dépêche spéciale de La Patrie. Chicoutimi, Qué, 15 – Une terrible explosion de dynamite et de poudre s’est produite, hier, à Bagotville, sur la ligne du chemin de fer en construction de la Baie des Ha Ha!

Les deux entrepreneurs Gagné et O’Brien, ingénieurs civils et quatre travailleurs ont été tués; plusieurs autres ont été blessés.

L’accident est arrivé hier après-midi, à trois milles du village de Bagotville à l’endroit des Chutes, dans une coupe de terre pratiquée pour la construction de la ligne.

Une grande quantité de dynamite et 200 quarts de poudre éclatèrent, et un éboulis de terre sur une étendue de 75 000 verges en retombant, ensevelit le camp où dormait l’équipe de nuit.

Sous les décombres a été trouvé Stanislas Gagné, ingénieur, fils de François,  de Saint-Joseph d’Alma. Il fit ses études à l’Université de Toronto, et était l’associé d’O’Brien. – En outre des deux entrepreneurs, ont été tués un nommé Jennings, de Toronto et un Danois.

Un autre Danois et un Suédois, Wm Peterson, sont mourants.

Olsen, Suédois, a subit des lésions graves. Un nommé Soucy, de Sainte-Hedwige, Lac-St-Jean, a eu une jambe cassée.

Le 16 avril, le portrait de la tragédie se précise:

LE DESASTRE DE BAGOTVILLE

Quebec 16. Nous apprenons de Chicoutimi, que l’éboulement meurtrier de jeudi dernier à Bagotville a couvert un terrain de vingt arpent carrés sur une épaisseur d’environ dix pieds. La mine avait été chargée de cinq mille livres de poudre de dynamite. L’explosion a pris une direction autre que celle que l’on attendait et c’est ce qui explique le désastre.

Plus d’un millier de personnes ont visité les lieux hier malgré le mauvais état des chemins. L’endroit est à cinq milles du village de St-Alphonse et à neuf milles de la ville de Chicoutimi.

Trois bâtiments de cent pieds par trente ont été détruits et couverts par les débris. Jusqu’ici, deux victimes ont été retirées des décombres.

Ce sont deux Suédois dont les noms sont inconnus. Trois blessés, deux Suédois et un Canadien, du nom de Soucy, de St-Edwige, Roberval. Celui-ci n’a qu’une jambe fracturée.

Il reste deux victimes sous les décombres: un Suédois inconnu et m. Ladislas Gagné, ingénieur bien connu à Toronto, et dans toute notre région; les entrepreneurs du chemin de fer sont MM O’Brien et Jennings, de Toronto. Les fouilles sont poussées avec ardeur, mais on croit qu’il sera impossible de trouver les deux dernières victimes, si elles ne  sont pas toutes sous les décombres des bâtiments écroulés. Il y avait une cinquantaine d’hommes sur les lieux lors du sinistre. L’ingénieur Gagné était dans un des bâtiments, mais le cuisinier qui a réussi à se sauver était tellement transporté qu’il ne sait si Gagné est sorti.

Tancrède Gagné et J. T. Armand courtier, de Montréal, frère et beau-frère du jeune ingénieur Stanislas Gagné, sont partis pour la scène du désastre hier soir.

***

Une du Quebec Chronicle du 15 avril 1910

Le corps de l’ingénieur Gagné a été retrouvé deux jours plus tard selon La Patrie du 18 avril. Il restait sous les décombres Olsen, père de famille. L’un des blessés, mourant, était  identifié comme étant un dénommé Torenfen. Dans l’édition suivante, La Patrie publie une autre liste des victimes: Ladislas Gagné (31 ans), Alex Robertson (40 ans), Marius Quinen (35 ans) et Olsen, 40 ans. Robertson et Quinen étaient de nationalité danoise. L’article précise que les travailleurs sur le chantiers étaient Italiens,  Finlandais et Suédois.

La tragédie de Bagotville a laissé sa marque dans la toponymie québécoise. Ainsi, l’événement est commémoré par le lieu-dit  L’Éboulis.

Vous pouvez voir ici de quoi avait l’air le réseau ferroviaire dans la région en 1913 (site du Ministère des Ressources naturelles du Canada).

Bibliographie

La Patrie, 15, 16 et 18 avril 1910

Noms et lieux fascinants du Québec [ressource électronique] / [COPAM] Concertation des organismes populaires d’alphabétisation en Montérégie, Châteauguay, Québec, 1998. Adresse URL

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Photographies de Québec (1886-1910) par Frederick C. Würtele

Frederick Würtele est un photographe amateur qui a pris plusieurs clichés de la ville de Québec entre 1886 et 1910. Retraçons d’abord les grandes lignes de sa vie pour ensuite nous pencher sur son oeuvre.

Biographie

Quartier Vieux-Québec-Basse-Ville - Rue Sous-le-Cap / Fred C. Würtele . - septembre 1902 Source: BANQ

Quartier Vieux-Québec-Basse-Ville – Rue Sous-le-Cap / Fred C. Würtele . – septembre 1902 Source: BANQ

Frederick Christian Würtele est né le 10 septembre 1842 à Québec. Il était l’époux d’Élizabeth Riddle (quatre enfants).

Il a reçu son diplôme de l’école militaire en 1867, puis il a obtenu le grade de capitaine des Royal Rifles en 1883. Würtele a fait carrière en tant que comptable, mais il a aussi travaillé entre 1870 et 1890 pour son frère et son père, deux marchands de quincaillerie et de fer. Il a été secrétaire-trésorier du High School of Québec en 1892 et de la Protestant Board of School Commissioners (1897-1920). Il est nommé Esquire en 1891. Entre 1877 et 1906, il a occupé presque sans interruption diverses fonctions à la Québec Literary and Historical Society (conservateur des objets et bibliothécaire). Entre 1910 et 1914, il a été secrétaire de l’Archeological Institute of America, Department of Canada, Québec Society.

Frederick Würtele est décédé à Québec le 18 mars 1920.

Un intérêt certain pour l’histoire

Historien, il a publié quelques écrits:

Il a édité Blockade of Québec in 1775-1776 by the American Revolutionists en 1905-1906.
Ses photographies

Les thèmes représentés par les photographies du Fonds Fred. C Würtele sont variés: vues d’ensemble, bateaux, l’histoire, l’architecture, aspect militaire, les églises protestantes, les paysages, l’hiver, les moulins à scie, les institutions d’enseignement,  les ponts et les portraits. (Réf. Fernand Caron, p. 18) Il a croqué sur le vif les conséquences des éboulis de septembre 1889 à Québec, de l’effondrement du pont de Québec en 1908, de la destruction de la tour Martello no3  pour l’agrandissement de l’ancien Jeffery Hale (un hôpital de Québec) en 1904,  etc.

Il a surtout photographié Québec et ses environs. Commme la écrit Fernand Caron, dans Fred C. Würtele, photogaphe ,Würtele:

photographie, à l’instar des touristes, les particularités de la ville tels le Vieux-Québec, les environs du Parlement ou bien la rue Saint-Pierre. (p.10)

Quartier Saint-Jean-Baptiste - Boulevard Saint-Cyrille Est - Tour Martello - Numéro 3 / Fred C. Würtele . - août 1904 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Quartier Saint-Jean-Baptiste – Boulevard Saint-Cyrille Est – Tour Martello – Numéro 3 / Fred C. Würtele . – août 1904 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Il nous a donné de superbes vues de Québec comme cette photographie prise du toit de la Banque Union et qui montre la rue Saint-Pierre (voir photographie suivante).

Dans l’ensemble, cependant, il a tracé un remarquable tableau de la ville de Québec qu’il sentait évoluer avec inquiétude. Cette affirmation n’est pas gratuite, compte tenu des nombreuses photos de démolitions et d’immeubles qu’ils nous a léguées. (Réf. p.11, Fernand Caron)

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A Québec, il a immortalisé le Morrin College, le Collège des Jésuites, le Marché Champlain, les plaines d’Abraham, le bureau de poste (et sa célèbre plaque du Chien d’or), le Capitole, les Jardins du Gouverneur, la rue Sous-le-Cap, le Bassin Louise, le Château Frontenac, la Grande-Allée, la Terrasse Dufferin, le quartier Saint-Roch, le quartier Latin, l’Esplanade, Place d’Armes, l’Hôtel de ville, et bien plus.

Voici quelques endroits qu’il a photographié: outre Québec, il y a Chicoutimi, Ottawa, Rivière-du-Loup, l’Ile d’Orléans, Chambly, Grand-Mère, Saint-Tite, Boischatel, Trois-Rivières, Saint-Romuald, Saint-André (Lac-Saint-Jean), Lennoxville (Sherbrooke), Toronto, Ottawa, Tewkesbury, Rivière-Ouelle, Lévis, etc.

Voici d’autres photographies:

Quartier Cap-Blanc - Rue Champlain - Catastrophe / Fred C. Würtele . - septembre 1889 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Quartier Cap-Blanc – Rue Champlain – Catastrophe / Fred C. Würtele . – septembre 1889 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

 

Beauport - Avenue Royale / Fred C. Würtele . - octobre 1897 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Beauport – Avenue Royale / Fred C. Würtele . – octobre 1897 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Le fonds Fred. C. Würtele contient plus de 575 photographies et il peut être vu presqu’entièrement en ligne sur le site de BANQ. Pour voir ces photos, allez sur Pistard, entrez le mot-clé de votre choix, cliquez sur Documents numérisés et validez. Sélectionnez ensuite Fonds Fred Würtele.  Des photographies sont aussi disponibles sur cybermuse.

Conclusion

Les photographies qui sont l’oeuvre de Fred Würtele constituent un témoignage intéressant sur la ville de Québec et ses environs à l’aube du 20e siècle. Elles mettent en valeur le patrimoine bâti, religieux et maritime du Québec. Ses photographies et ses diverses fonctions montrent à quel point il avait à coeur l’histoire et le patrimoine de Québec.

Sainte-Pétronille-de-l’Île-d’Orléans - Camp d'entraînements de l'Artillerie royale canadienne / Fred C. Würtele . - août 1904 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Sainte-Pétronille-de-l’Île-d’Orléans – Camp d’entraînements de l’Artillerie royale canadienne / Fred C. Würtele . – août 1904 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Bibliographie

CARON, Fernand. Fred C. Würtele, photogaphe.Ministère des Affaires culturelles, 1977, 276 pages.

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J’ai la mémoire qui tourne (site web de l’émission à Historia)

Il y a quelques temps Historia, une chaîne de télé québécoise spécialisée en histoire, lançait un appel au public pour trouver des films de familles tournés en 1920 et 1989. Ces films allaient constituer le matériel de base pour l’émission  »J’ai la mémoire qui tourne » diffusée dès août 2009. Je vais vous présenter aujourd’hui le site web de cette émission.

memoire

Les films

On retrouve énormément de contenu vidéo sur le site de J’ai la mémoire qui tourne. Il y a des vidéos amateurs tournés à Québec, à Roberval, Rivière-du-Loup, Chicoutimi, Percé, Montréal, donc un peu partout à travers le Québec.

Il y a des webépisodes dont une qui porte sur Maurice Richard, commentée par Ron Fournier.

Le blogue

Le blogue de l’émission est rédigé par Sylvain Cormier, Marie Brunette, Yanic Viau, Marie-Michèle Tremblay, Eric Ruel et Guylaine Maroist. Ces billets donne des informations sur les vidéos: dans quelles circonstances ils sont été réalisés, dans quel contexte historique, etc. Comme quoi même les films de famille recèlent d’informations sur l’histoire du Québec!

Il manque quelques fois un lien vers le vidéo dont il est question dans le billet.

Web collaboratif

Le public est invité à enrichir le contenu de ce site web et ce, de plusieurs façons. En s’inscrivant (gratuitement), on peut téléverser des films issus de nos archives familiales, commenter et ajouter des tags (mots-clés) décrivant les films en ligne. On peut créer une liste de nos films préférés ou les partager via les médias sociaux (Facebook, Twitter, Delicioux, Digg, etc) ou par courriel.

La prochaine série de J’ai la mémoire qui tourne sera présentée à l’automne 2010.

On peut aussi suivre  »J’ai la mémoire qui tourne » via Facebook.

Le premier épisode de la série peut être visionné en cliquant ici.

En somme, cela vaut la peine d’être un visiteur régulier de ce site et d’y contribuer!

Adresse: http://jailamemoirequitourne.historiatv.com/accueil

Billet relié: