Voici une sortie en règle de la part de monsieur Bocage de St-Gervais, suite à l’élection des commissaires scolaires. L’ambiance devait être très bonne à Saint-Gervais après la parution de cette lettre.
Le Canadien, 11 juillet 1845
M. le Rédacteur,
L’élection des commissaires d’écoles vient de se terminer; en voici le résultat: huit commissaires, dont six ne possèdent absolument aucune éducation; les deux autres lisent misérablement et écrivent machinalement leurs noms.Voilà, M. le rédacteur, les hommes d’élite à qui la paroisse de Saint-Gervais confie les destinées de sa jeunesse; voilà les hommes qui doivent qualifier, disqualifier les maîtres; veiller au maintien et au bon ordre de vingt écoles; voilà les juges des différends qui s’élèveront entre les maîtres et les élèves, ou entre les parents et les maîtres.
Réjouissez-vous, habitants de Saint-Gervais, le bon vieux temps va revenir! mais vous surtout, timides instituteurs et institutrices, que la seule pensée d’un examen à subir fesait trembler de tous vos membres, ne craignez plus, vos examinateurs en savent encore moins que vous ; mais gare les salaires! eux gagnent £9 par année et suent sang et eau; vous qui devez être à l’ombre, £7 vous paieront. En avant toujours l’éducation! Mais je veux être juste et rendre à César ce qui lui appartient; si nos commissaires ne sont pas instruits, ils sont tous braves et honnêtes; il y a dans le corps des commissaires un excellent maçon, un bon cordonnier, un habile faiseur de bois carré, un invincible client de Thémis et quelques laboureurs bien passable. Vivent [sic] nos cultivateurs pour mettre chacun à sa place, et donner aux acteurs de Saint-Gervais les rôles qui conviennent à leur génie! Chez eux les aveugles jugent des couleurs et les sourds des sons. Quels progrès va faire l’éducation en de telles mains!
J’ai cru, M. le rédacteur, qu’il valait mieux rire que pleurer d’une chose qu’on ne saurait empêcher.
G. T. Bocage
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