Explosion à Hochelaga [26 mai 1888]

En 1888, Hochelaga (Montréal) était éclairée grâce au gaz depuis plus de 16 ans. Pour fournir ce gaz, la Montreal Gaz Company avait bâti un énorme gazomètre de 50 pieds de hauteur, 120 pieds de circonférence, ayant une capacité de stockage de 700 000 pieds cubes (Daily Witness, 26 mai 1888). Le réservoir avait été construit en briques et en fer.

Carte de 1879 représentant Hochelaga. Les installations de la Montreal Gaz Company sont en bas, à gauche, dans la zone verte. Source: BANQ. Pour voir la carte agrandie, cliquez sur celle-ci puis sélectionnez la carte numro 74. 

Le 26 mai 1888, à 8:30 du matin, une douzaine d’employés sont présents sur les lieux. La catastrophe survient. Puis un énorme bruit se fait entendre. Les curieux se précipitent pour voir ce qui s’est passé. Et on constate que c’est sérieux.

Le gazomètre a complètement été détruit.

Ce vaste réservoir n’était plus qu’un amoncellement de briques, poutres en fer brisées et tortues, solives en charpie, rejetées du réservoir, rempli d’eau sale et verdâtre, et sur lequel s’était aplatie la grande couverture en tôle. Source

L’explosion avait fait cinq morts et plusieurs blessés.

Selon les journaux de l’époque, sont décédés:

Samuel McCaffee, né en Irlande, âgé d’une vingtaine d’années;

Sam Bell (surveillant du gazomètre ou ingénieur), 42 ans;

John Angell, 22 ans;

Joseph Angell, frère de John;

James ou Thomas Stacey, peintre de la Montreal Bridge Co, Indien de Caughanawaga, âgé de 27 ans;

Blessés (brûlures, etc):

Angus Guy  (peintre de la Montreal Bridge Co, Indien de Caughanawaga, âgé de 27 ans);

Georges Fischer, peintre de la Montreal Bridge Co,  américain âgé de 24 ans

Gerard Donohue, 31 ans;

Robert Culquhoan, environ 35 ans et

Richard Peachey.

La scène du désastre. Extrait du Monde illustré, 2 juin 1888

Les causes du drame

M. Joseph, président de la Montreal Gaz Company:

la couverture s’étant effondrée et que la compression de l’air avait fait éclater les taurailles (?); en un mot, une simple question de construction. Source

Un ingénieur:

c’est Angell qui est venu chercher une lampe ici et il  faut que le feu ait été causé par le feu, car l’explosion a eu lieu quelques minutes après son départ, le temps de se rendre au réservoir. Source

Mr Angell, cousin du défunt:

celui-ci [Angell] lui a dit qu’il voulait inspecter le réservoir. Il lui fit observer qu’il ferait mieux de prendre une lanterne sourde, parce qu’il y avait des fuites de gaz et que c’était dangereux. Source

Le verdict du jury

Nous soussignés, jurés  à l’enquête tenue pour constater la cause de la mort de Samuel  Bell, Thomas Stacey, Joseph Angell, John Angell et Samuel McAfee, déclarons que ces personnes sont mortes des blessures qu’elles ont reçues à la suite d’une explosion d’un mélange d’air et de gaz carbonique, contenu dans un gazomètre construit sur un terrain et dans un bâtiment appartenant à la nouvelle compagnie du gaz, sur la rue du Havre, quartier d’Hochelaga, en la cité de Montréal, et faisant partie des usines de la dite compagnie; que cette explosion a été causée par l’introduction d’une lampe allumée dans le dit gazomètre par Joseph Angell, un des employés de la dite compagnie et l’une des victimes de l’explosion. Nous déclarons, en sus, que ledit Joseph Angell, en s’introduisant ainsi, avec une lampe allumée, dans le gazomètre, a agi par ignorance et par imprudence, et non pas par malice ou avec l’intention de blesser ou de causer de tort à qui que ce soit. Source. la Minerve, 7 juin 1888.

Bibliographie

Le Canadien, 28 mai 1888

The Daily Witness, 26 mai 188828 mai 1888 ,  29 mai 1888

La Minerve, 28 mai 1888, 29 mai 1888, 30 mai 1888, 7 juin 1888

L’enseignement en milieux défavorisés. Energie: le gaz. Sous la direction de Robert Cadotte [n’est plus en ligne] Site consulté le 13 août 2011.

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Au 19e siècle,  la glace était suffisamment épaisse sur le fleuve Saint-Laurent pour que les traîneaux puisse traverser sur l’autre rive. On a même réussi à faire traverser un train sur l’eau gelée, entre Longueuil et Hochelaga!

Longueuil, terminus ferroviaire

Print | St. Lawrence & Atlantic R.R. Longueil Station, 1855 | M982.530.129

Gare de Longueuil de la Compagnie du chemin à lisses du Saint-Laurent et de l’Atlantique, 1855

Dès 1848, un tronçon reliait Longueuil à Saint-Hyacinthe. Il a été construit par la Atlantic & St. Lawrence Railway, acheté plus tard par The Grand Trunk Railway System. L’économie de la vie était  florissante; le train créait de l’emploi. Cela a duré jusqu’en 1860, alors que le Grand Trunk Railway System (Grand Tronc) construisit le pont Victoria et déménagea à Montréal.  Les marchandises étaient expédiées par le train jusqu’à Longueuil, puis transporté par bateau de l’autre côté du fleuve. Maintenant, on passait directement par le pont Victoria. Cela porta  une coup énorme à la vitalité économique de Longueuil.

Un train sur le fleuve

Quelques années plus tard, Louis-Adélard Senécal, surintendant général de la Québec, Montréal, Ottawa & Occidental Railway (nouvel acquéreur du chemin de fer de Longueuil) voulut relancer les installations ferroviaires abandonnées. Sa compagnie désirait relier Longueuil à Hochelaga, or il y avait un désagrément: il fallait passer par le pont Victoria. Le Grand Tronc en était le propriétaire et demandait des droits de passages élevés. On ne fait pas de cadeaux à la concurrence. Il fallait trouver une alternative. D’où l’idée de passer sur le fleuve.

La Quebec, Montreal, Ottawa and Occidental Railway releva le défi. En janvier 1880, des rails furent installés sur le fleuve gelé entre Longueuil et Hochelaga. Le 31 janvier eut lieu la première traversée – avec passagers- devant une foule curieuse. Le premier ministre Joseph-Adolphe Chapleau était du voyage. Poids de la locomotive: un  »modeste »69 000 livres selon la Minerve du 2 février.  Le voyage aller-retour coûtait 25 centins.

Photographie | Chemin de fer sur le fleuve Saint-Laurent gelé, Montréal, QC, 1880 | VIEW-1141.1

Chemin de fer sur le fleuve Saint-Laurent gelé, Montréal, QC, 1880

Et crack!

L’année suivante, on remit en service ce chemin de fer temporaire. Le 5 janvier 1881, on testa la glace. Ensuite, on amena la locomotive, mais elle dérailla…

Le poids de la locomotive fit céder une glace affaiblie et il s’en fallut de peu pour qu’Adélard Senécal et les autres passagers de la locomotive ne prennent un bain forcé quand la locomotive disparut sous plus de 10 m d’eau glacée. (réf)

Et la glace cède... Canadian Illustrated News, 15 janvier 1881

Et la glace cède… Canadian Illustrated News, 15 janvier 1881

Un dénommé Larin fut chargé de récupérer la locomotive. Les passagers purent sortirent sain et sauf et on ne compta aucun blessé. On répara et déplaça la voie. Deux jours plus tard, on tenta un nouvel essai avec une locomotive moins lourde et le service pu reprendre. Heureusement, le reste de la saison se déroula sans problème.

L’année suivante, l’hiver fut doux, cette voie de transport fut donc peut utilisée. Le service fut de retour en 1883, pour une dernière année. Le chemin appartenait alors à la South Eastern Railway qui éprouvait des ennuis financiers. Elle fut rachetée par le Canadien Pacific qui ne maintint pas le chemin de fer sur la glace.

 Le train fait une pose pendant que William Notman immortalise la scène


Le train fait une pause pendant que William Notman immortalise la scène. Canadian Illustrated news, 14 février 1880.

Bibliographie

KALBFLEISCH, John. This Island in Time, Remarkable Tales from Montreal’s Past. Montréal,  Véhicule Press, 2008 , 192 pages.

La Minerve: 31 janvier et 2 février 1880, 5 et 7 janvier 1881.

Pierre Leford. Le chemin de fer sur la glace.  Histoire Québec, mai 2000, volume 6, no 1.

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