Un cercueil sur la rive [1892]

La Patrie, 23 mai 1892

« UN CERCUEIL SUR LA RIVE
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Etrange trouvaille à Saint Joseph de Sorel
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Un petit cadavre bien conservé
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A-t-il été emporté par la débâcle
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Mercredi dernier, MM. Pierre et Antoine Thibault, de l’Isle Saint-Ignace, qui étaient à pêcher à la senne, vis-à-vis de la « Pointe des Pins », à Saint Joseph de Sorel, aperçurent sur la grève une boîte qui attira leur attention et ils s’en approchèrent aussitôt. Cette boîte, d’une couple de pieds de longueur, était ouverte à sa partie supérieure et contenait le corps d’une enfant âgée d’à peu près un an et demi. Cette enfant ne portait aucune marque de violence, avait les mains jointes sur la poitrine et était ensevelie. Elle était bien conservée.

D’où venait-elle, qui l’avait ainsi exposée? Mystère que tout cela.

Il est probable, disent les uns, qu’elle venait des alentours de Montréal, où des parents très pauvres et sans coeur ni âme l’auraient, pour ne point payer les frais de funérailles, déposée sur la glace, et qu’elle aurait été emportée, lors de la débâcle, jusqu’à l’endroit où elle a été trouvée. D’autres prétendent qu’elle a dû être enlevée d’un charnier quelconque et que les détrousseurs, voyant que ce n’était le cadavre qu’ils voulaient, l’ont abandonné dans son cercueil sur la grève.

Quoi qu’il en soit, cette trouvaille est bien lugubre, et elle indique, quelque part, un bien triste état des choses.

M. le coroner Bondy a tenu une enquête jeudi soir, et le jury a rendu le verdict: Trouvée morte sur la grève, dans la paroisse de Saint-Joseph de Sorel.

Le petit cadavre a été inhumé dans le cimetière de cette paroisse. »

Note: cet article reprend celui publié dans Le Sorelois du 20 mai 1892 en y ajoutant quelques détails.

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Jugée morte [Montréal, 1823]

Le Canadien, 19 mars 1823

Montreal, 12 mars

Le 27 du mois dernier, une petite fille, âgée de 13 ans et 9 mois, enfant de François Benoît, dans le faubourg de Québec, ayant été malade depuis quelques jours, paroissant avoir perdu tout signe de vie et de mouvement fut jugée morte. Par la pauvreté de ses parens, elle ne fut pas enterrée le jour destiné pour ses funérailles. Mais dans les 24 heures après, au grand étonnement de ses amis, elle manifesta des signes de vie, et elle vécut dix jours après.

D’après les circonstances de ce fait, l’on ne peut trop donner d’attention à examiner l’état des personnes qui sont réputées mortes, sans avoir manifesté aucun des signes effrayans de la mort. Ceci est un exemple et une leçon pour tous.

Dans  l’article du Montreal Herald du 12 mars, on dit que l’enfant est âgée de 3 ans et 9 mois.

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Il apprend sa propre mort [un homme éberlué, Montréal, 11 avril 1915]

ON LUI APPREND QU’IL EST MORT

M. Viateur Laforest, de l’Avenue Laval, se rend compte lui-même des regrets qu’il laissera en quittant ce monde

AU PRÔNE DU DIMANCHE

M. Viateur Laforest, président de la maison de comptabilité Laforest, Brault & Cie, demeurant avenue Laval no.269, peut se faire une idée assez juste de l’estime dont il  jouit et des regrets qu’il laissera en quittant notre vallée de larmes. Il est, en effet, un des rares survivants à leur propre mort et il ne suffit pas depuis hier de répondre lui-même aux messages de sympathie adressés à sa famille à l’occasion de son décès anticipé. Toute macabre qu’elle puisse être cette histoire a aussi son côté drôlatique.

M. Laforest assistait hier à la messe de 8 heures hier matin dans une église du centre de la ville quand un des vicaires faisant les annonces d’usage le recommanda aux prières des nombreux fidèles en disant qu’il venait de mourir subitement à sa maison privée. Il n’en crut  pas d’abord ses oreilles, mais il fallut se rendre à l’évidence en constatant braqués sur lui les regards stupéfaits de plusieurs des assistants qui le connaissaient bien et croyaient maintenant se trouver en présence de son spectre. Son premier mouvement fut de sortir de l’église et de courir chez lui pour s’assurer de ses propres yeux si en effet il était bien sur sa propre couche funèbre, mais il se ravisa de crainte de causer une panique dans le temple et méditant profondément sur ses fins dernières, il s’agenouilla pieusement avec tous les fidèles après le prône, lorsque le prêtre, selon la coutume, récite le Pater et l’Ave pour le repos de l’âme des défunts. Jamais il ne pria, dit-il, avec autant de ferveur, mais après la messe il n’eut rien de plus pressé que d’aller s’enquérir à la sacristie de la cause de ce mystère.

La Patrie, 12 avril 1915.

Nouvelle stupéfaction, mais cette fois de la part du vicaire. On courut aux informations et finalement on constata l’erreur. La nouvelle de la mort de M. Arthur Dorais, voisin de M. Laforest, avait été mandée par téléphone au presbytère et comme il y a ressemblance de consonance dans les deux noms, l’on avait distraitement écrit l’un pour l’autre.

L’erreur a été corrigée aux messes suivantes, mais la mort de M. Laforest courait déjà la ville et les condoléances ont afflué pendant toute la journée au No 269 de l’avenue Laval.

M. Laforest, à qui un représentant de la PATRIE a présenté ses félicitations ce matin, est bien amusé de cet incident, qui lui a procuré, comme nous le disons au commencent une occasion aussi unique de compter ses amis. Il ne s’en croyait pas autant.

Extrait de la Patrie, 12 avril 1915

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Registre d’écrou de la prison de Québec: un prisonnier « dead by the visitation of God » (1834)

En fouillant dans les Registres d’écrous des prisons de Québec au 19e siècle mis en ligne par BANQ pour mettre à jour le billet La déportation d’après les registres d’écrous des prisons de Québec (Bas-Canada, 19e siècle) je suis tombée sur une mention intriguante.

Il y avait dans la fiche d’un des candidats à la déportation ces mots:   »Coroner inquest, dead by the visitation of God ».

C’est à la prison de Québec que James Ryan a été emprisonné. La prison est part la suite devenue le College Morrin, puis le Centre Morrin. On voit ici le bâtiment de la prison alors qu’il sert de collège. Photo: Fred Würtele, 1902. Source BANQ

Cet homme, James Ryan, est probablement décédé le 8 septembre 1834. Il a été emprisonné le 14 août 1833, étant alors âgé de 24 ans. C’était un  »military convict » (soldat et prisonnier) condamné à la déportation. Où devait-il être déporté? Pour combien de temps? On ne le sait pas.

41 des pensionnaires des prisons de Québec au 19e siècle ont la mention  »dead by the visitation of God » à leur dossier.

Que veut dire l’expression  »dead by the visitation of God » (visitation de Dieu)? Il faut regarder du côté du coroner.

Tous les cas de mort suspecte tombe sous son autorité [le coroner], même ceux où le médecin s’est trompé par ignorance dans le traitement de la maladie. Si le coroner et le jury ont tout lieu de reconnaître que le décès doit être attribué à des causes naturelles ou, selon l’expression anglaise, à la visitation de Dieu, visitation of God, ils constatent et expriment le fait. (Réf)

Ce type de verdict était donc rendu suite à l’examen du cadavre pour déterminer la cause du décès. Dans certains cas, c’était l’équivalent de  »mort de cause naturelle ».

Webographie

About.com [en ligne] Visitation of God [Page consultée le 1er juin] Adresse URL
Revue des deux mondes, Volume 73, p. 691 et 692 Adresse URL

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