Prudent Toussaint et Estelle Labrecque (Saint-Gervais, QC)

Le 27 juin 1910, l’église de Saint-Gervais accueille deux mariages. Deux des garçons de Joseph Toussaint et de Désanges Théberge quittent le célibat. Prudent, âgé de 23 ans, épouse Estelle, 21 ans et son frère Georges, 24 ans, unit sa destinée à Ludivine Roy, âgée de 17 ans. Les frères de mon arrière-grand-père connaissaient leurs épouses depuis la tendre enfance, ayant tous été élevés à Saint-Gervais, une paroisse agricole située près de Québec.

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Georges et Ludivine vont passer le reste de leur vie à Saint-Gervais. Pour ce qui est de Prudent et d’Estelle, ils vont devoir quitter la région, comme bien des Canadiens-français en quête d’un avenir meilleur. Retraçons quelques étapes de leur parcours.

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Saint-Gervais, Bellechasse. Carte postale non-datée faisant partie de la collection Magella Bureau, BANQ. P547,S1,SS1,SSS1,D522 http://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/3134303

Quelques semaines, quelques mois après leur mariage, les jeunes époux prennent le chemin du Massachusetts. Peut-être vont-ils rejoindre des amis ou des membres de leurs familles habitant cet état américain. Le premier enfant du couple, Yvette, y naît le 4 août 1911. Prudent est décrit dans son acte de mariage comme étant « journalier ». À la naissance d’Yvette, le métier indiqué est « carpenter (charpentier) ».

Leur deuxième enfant, Simone Jeannette, voit le jour l’année suivante. La famille Toussaint habite Salem pendant environ trois ans.

Ils sont de retour au Québec en 1914 puisqu’Estelle accouche d’Amédée-Georges-Rolland, leur troisième enfant, le 11 mars à Montréal. Les semaines suivantes seront difficiles. Amédée-Georges-Rolland ne survit que quelques jours et décède le 4 avril. Le 23 avril, c’est au tour du père d’Estelle, Maxime Labrecque, de quitter ce monde. Le couple perd aussi la petite Simone Jeannette le 15 mars 1915. Ces trois décès surviennent à Montréal. Leur fils Gérard naît dans la métropole le 21 avril 1915, mais il n’y grandira pas.

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De Salem à Montréal © les contributeurs d’OpenStreetMap

Les Toussaint quittent Montréal pour s’établir à Lévis, une ville située près de Saint-Gervais et de Québec. Amédée y naît le 22 août 1917 et Thérèse le 14 mars 1919. Hélas, c’est à Bienville (qui fait maintenant partie de Lévis) que Prudent a la douleur de perdre sa femme, Estelle, le 19 septembre 1920. Elle n’était âgée que de 31 ans.

Prudent s’installe ensuite un peu plus loin, à Montmagny. La petite dernière de la famille, Thérèse, y décède le 22 janvier 1921. Prudent, âgée de 34 ans, est maintenant veuf et doit subvenir aux besoins de trois enfants: Gérard (6 ans), Yvette (10 ans) et Amédée ( 4 ans). En cherchant dans le recensement canadien de 1921, j’ai appris que les enfants avaient été placés à l’orphelinat de Montmagny.

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Qu’est-il advenu de ces quatre membres de la famille Toussaint?

Amédée est décédé à Methuen, Massachusetts, le 25 juillet 1983 (Massachusetts Death Index, 1970-2003).

Gérard a épousé Graziella Bédard à Québec le 16 juin 1945. Il est décédé avant 1985 est décédé à Beauport le 18 mars 1968 (merci Jacques!).

Quant à Yvette, selon le recensement américain de 1930, elle était servante chez la famille Hirshberg à Haverhill, Mass. Après, je perds sa trace. Peut-être s’est-elle mariée?

Deux enfants au Massachusetts, un au Québec, où Prudent peut-il bien être?

Et bien, il est reparti au Massachusetts. Il s’est remarié à Lawrence le 24 octobre 1923 avec Palmire Labrecque (fille de Prudent Labrecque et de Palmyre Dionne) selon un arbre généalogique déposé sur My Heritage. Ils ont eu deux filles, Loretta (James A. Devlin) et Rita (Joseph W. Dubois). Il serait décédé le 10 juin 1937 et a été inhumé au cimetière du Sacré-Coeur d’Andover, Massachusetts. On peut voir sa pierre tombale sur Find a grave.

Saint-Anselme, 1922

Une fois de temps en temps, j’aime bien vous raconter l’histoire de gens ordinaires ayant fait l’objet d’un article dans la presse d’antan. Cette fois-ci, je vous présente Albert Turgeon de Saint-Anselme.

Il est né vers 1874, fils de Michel Turgeon et Philomène Lemieux, mariés le 5 juillet 1864 à Saint-Gervais, Bellechasse. Albert semble avoir vécu toute sa vie dans la paroisse voisine, Saint-Anselme.

Famille Turgeon en 1871. Recensement canadien de 1871, Saint-Anselme

Famille Turgeon en 1871. Recensement canadien de 1871, Saint-Anselme

Albert apparaît dans le recensement canadien de 1881. Sa mère, Philomène, s’est remariée le 4 mai 1875 à Saint-Gervais avec Cyrille Larochelle. Joseph, Alphonse, Octave et Emma complètent la famille.

Famille Turgeon, 1881. Recensement canadien de 1881, Saint-Anselme.

Famille Turgeon, 1881. Recensement canadien de 1881, Saint-Anselme.

Selon le recensement canadien de 1901 à Saint-Anselme, il était ouvrier de mines. Il ne s’est jamais marié.

Voici comment les lecteurs de l’Action catholique ont entendu parler, probablement pour la première fois, de ce cultivateur du comté de Bellechasse.

L’Action catholique, 28 mars 1922

Une macabre découverte à Saint-Anselme


Un homme trouvé mort dans son lit à St-Anselme

Dimanche dernier à St-Anselme, Co. Dorchester,  ca [sic] trouvait, mort dans son lit M. Albert Turgeon, cultivateur, qui demeurait au centre du village. Ce fût tout un émoi quand on découvrit ce cadavre et la mort n’était pas récente vu le commencement de décomposition.

Le défunt souffrait depuis quelques jours d’une attaque de grippe et ne sortait pas. Ses parents et voisins s’inquiétèrent dimanche matin de ne pas voir le défunt et se rendirent à sa résidence. M. Turgeon est célibataire et reste seul. En entrant dans la maison ils furent frappés de l’odeur particulière qui se dégageait et découvrirent le cadavre.

Le coroner Louis J. Piuze a conclu qu’il était « mort d’une congestion pulmonaire ayant déterminé une syncope de cœur ». Source: Base de données Enquêtes des coroners des districts judiciaires de Beauce, 1862-1947; de Charlevoix, 1862-1944; de Montmagny, 1862-1952; de Québec, 1765-1930; et de Saint-François (Sherbrooke), 1900-1954.

Souvenirs des Toussaint [St-Gervais, Bellechasse, 1897]

Capsule généalogique….

Mes arrières-arrières-grands-parents Joseph Toussaint et Reine-Désanges Théberge se sont mariés à Saint-Gervais, Bellechasse le 25 février 1884. Joseph, comme la plupart de mes ancêtres, était cultivateur. Je savais que le couple avait eu au moins cinq enfants soit Alphonse (v. 1884), Prudent (v. 1885), Georges (v. 1886), mon arrière-grand-père Jules (1888) et Emilie (1894).

Jules Toussaint (troisième à partir de la droite, deuxième rangée), son épouse Marie Morin et leurs enfants, fin des années 30?

Jules Toussaint (troisième à partir de la gauche, deuxième rangée), son épouse Marie Morin et leurs enfants (certains accompagnés de leur conjoint), fin des années 30 à Saint-Camille-de-Lellis ou Sainte-Justine?

L’écart de six ans entre Jules et la petite dernière de la famille m’a incité à vérifier si Joseph et Reine-Désanges n’avaient pas eu d’autres enfants.

La consultation des registres de Saint-Gervais m’a permis de retracer l’existence de quatre autres membres de la famille. Il manquait à ma liste Joseph-Edouard (1890), Marie-Olivine-Denise (1891), Anna (1893) et Joseph-Philippe (1896).

En 1897, en quelques semaines, ces quatre enfants ont été emportés par la maladie. D’abord, Joseph-Philippe est décédé le 3 septembre. Puis Joseph-Edouard le 13 octobre et et Anna deux jours plus tard. Marie-Olivine-Denise a rendu l’âme le 15 octobre.

Extrait de La Colonisation dans les comtés de Dorchester Bellechasse, Montmagny, L'Islet, Kamouraska par Eugène Rouillard, 1901.

Extrait de La Colonisation dans les comtés de Dorchester Bellechasse, Montmagny, L’Islet, Kamouraska par Eugène Rouillard, 1901.

Mon arrière-arrière-grand-père Joseph est décédé en 1900 à l’âge de 36 ans et Reine-Désanges a vécu jusqu’en 1927.

Pour en savoir plus sur la mortalité infantile (dans un contexte urbain), lisez La mortalité infantile au tournant du XXe siècle au Canada français par Jean Milot.

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Trois décès à Sainte-Justine, Bellechasse [1905]

Égarés en forêt [canton Langevin, 1868]

Décès accidentel de Pasquale Toto [Ste-Justine, 1910]

Des commissaires scolaires incompétents? [St-Gervais, 1845]

Voici une sortie en règle de la part de monsieur Bocage de St-Gervais, suite à l’élection des commissaires scolaires. L’ambiance devait être très bonne à Saint-Gervais après la parution de cette lettre.

Le Canadien, 11 juillet 1845

M. le Rédacteur,
L’élection des commissaires d’écoles vient de se terminer; en voici le résultat: huit commissaires, dont six ne possèdent absolument aucune éducation; les deux autres lisent misérablement et écrivent machinalement leurs noms.

Voilà, M. le rédacteur, les hommes d’élite à qui la paroisse de Saint-Gervais confie les destinées de sa jeunesse; voilà les hommes qui doivent qualifier, disqualifier les maîtres; veiller au maintien et au bon ordre de vingt écoles; voilà les juges des différends qui s’élèveront entre les maîtres et les élèves, ou entre les parents et les maîtres.

Réjouissez-vous, habitants de Saint-Gervais, le bon vieux temps va revenir! mais vous surtout, timides instituteurs et institutrices, que la seule pensée d’un examen à subir fesait trembler de tous vos membres, ne craignez plus, vos examinateurs en savent encore moins que vous ; mais gare les salaires! eux gagnent £9 par année et suent sang et eau; vous qui devez être à l’ombre, £7 vous paieront. En avant toujours l’éducation! Mais je veux être juste et rendre à César ce qui lui appartient; si nos commissaires ne sont pas instruits, ils sont tous braves et honnêtes; il y a dans le corps des commissaires un excellent maçon, un bon cordonnier, un habile faiseur de bois carré, un invincible client de Thémis et quelques laboureurs bien passable. Vivent [sic] nos cultivateurs pour mettre chacun à sa place, et donner aux acteurs de Saint-Gervais les rôles qui conviennent à leur génie! Chez eux les aveugles jugent des couleurs et les sourds des sons. Quels progrès va faire l’éducation en de telles mains!

J’ai cru, M. le rédacteur, qu’il valait mieux rire que pleurer d’une chose qu’on ne saurait empêcher.

G. T. Bocage

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Les pauvres de Saint-Gervais [1807]

L’instruction des sourds-muets [1831]

En 1913-1914, que voulait-on que les jeunes Canadiens-français lisent?

Boisson sous la tribune de l’institutrice [Mont-Albert, 1936]

Les pauvres de Saint-Gervais [1807]

Le Canadien, 26 septembre 1807

PAUVRES DE ST. GERVAIS

Les mendians qui prennent le nom de Pauvres de St. Gervais devroient plutôt prendre le tître de Pareffeux de St. Gervais. – Ces mendians sont robustes, capables de travailler, paresseux, &c, &c. Pour n’avoir pas la peine de travailler à la terre, ils se logent sur quelques emplacemens. Ceux d’entr’eux qui ont des terres les vendent & en prennent dans des endroits plus reculés; ils ont le soin de se mettre tous dans la même concession pour être ensemble, & s’éloigner de ceux qui vivent honnêtement de leur travail, & qui pourroient leur faire des reproches.

Ils partent tous ensemble & vont mendier dans les campagnes & dans les Villes, ils font des levées considerables de bled, de farine, dont ils font des depôts qu’ils vendent; ils ont aussi de l’argent. – Ils n’ont point de billets de leur Curé, ou ils lui en imposent pour en obtenir, ceux qui en obtiennent les prêtent ou les louent aux autres. Le pays est empeste’ de cette espece de gens, qui arrachent les secours qui devoient être reservés aux vrais pauvres; les habitans des campagnes ne peuvent abandonner leurs maisons, pour aller aux champs, de crainte qu’il ne vienne quelqu’un de ces paresseux, dont ils doutent de l’honnêtete’.

Ces gueux en imposent sur les honnêtes gens, ils les menacent de maux, de sorts, &c. – ils ont acquis par ce moyens un tel credit chez les habitans qu’on les craint & qu’on n’ose leur refuser. Les paresseux des autres paroisses quêtent sous ce nom de Pauvres de St. Gervais pour n’être point refusés. Ils n’osent point mendier dans leurs propres Paroisses parce qu’ils y sont connus pour paresseux. Ils reviennent presque tous chez eux pendant les tems des récoltes, mais ce n’est point pour travailler; c’est crainte qu’on ne leur demande à travailler.

De retour chez eux, ils font des repas et des divertissemens entr’eux dans leur Concession. Ils passent la journée à fumer à l’ombre avec de longues pipes, pendant les récoltes. Si on leur demander à travailler, ils disent qu’ils gagnent plus à quêter. ils ont donné une mauvaise réputation à leur Paroisse, mais elle ne le mérite pas, car elle est d’ailleurs composée d’habitans honnêtes et industrieux, qui méprisent et désavouent la conduite de ces mêmes mendians. Les terres y sont aussi fertiles qu’ailleurs, et il y a autant de moyens d’y gagner sa vie par le travail. Une des mauvaises suites de la pratique de ces paresseux, c’est qu’ils élevent leurs enfants dans la paresse, et dans les vices qui l’accompagnent. Les habitans des compagnes sont charitables, on ne sauroit trop les en louer & on ne sauroit trop leur recommander de l’être; Mais on ne devroit être sur ses gardes, en donnant la charité, afin qu’elle soulage le pauvre honnête et qu’elle n’encourage point la paresse ni le vice, et qu’elle ne prive point le laboureur de bras dont il a besoin.

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