La Patrie, 14 juin 1917
L’ART CANADIEN EN DEUIL
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LE SCULPTEUR PHILIPPE HÉBERT EST MORT HIER
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SON OEUVRE EST AVANT TOUT NATIONALE ET SON NOM RESTERA L’UN DES PLUS GRANDS DANS L’HISTOIRE DE L’ART EN AMÉRIQUE
__BIOGRAPHIE
M. Louis Philippe Hébert, notre grand sculpteur canadien, est mort hier après-midi, à sa résidence de l’Avenue Elm, dans sa soixante-huitième année. La mort n’aura surpris ni le maître qui l’envisageait avec sa grande foi de chrétien, ni même ses amis qui le savaient souffrant depuis assez longtemps déjà. M. Hébertavait été au repos tout l’hiver et il n’apparaissait guère à l’atelier que pour y travailler un bas-relief représentant son père. Toutes les oeuvres de la dernière époque de sa vie portent sur les scènes rustiques de la vie canadienne et le maître trouvait de grandes joies patriotiques à l’expression des choses du terroir dans ses travaux de sculpture. Et, c’est avec tristesse que vers la fin de l’hiver, il a dû abandonner le burin et se confiner sans ses appartements.
Hébert fut un sculpteur national; ses principales oeuvres évoquent les grandes figures de notre passé et il restera l’une des grandes figures dans l’histoire de l’art en Amérique.
Bibliographie
M. Louis Philippe Hébert naquit à Ste-Sophie d’Halifax, comté de Mégantic, le 27 janvier 1850. Son père, Théophile Hébert, était descendants d’Acadiens et l’un des grands défricheurs des Cantons de l’Est. Sa mère était Mlle Julie Bourgeois. Sa jeunesse se passa dans les travaux des champs. Son oeuvre en a gardé la forte empreinte; les motifs de ses bas reliefs ont toujours été des colons et des défricheurs portant une faucille ou une gerbe de blé dans les mains. Qu’on regarde son Lambert Closse, représentant la lutte à mort d’un colon avec un Iroquois.
En 1869, il était à Rome parmi les zouaves pontificaux.
Il étudia ensuite la sculpture avec Napoléon Bourassa, à Montréal. C’est à Paris qu’il se perfectionna dans la sculpture. Entre temps, il avait épousé MlleMarie Roy, fille de M. Thomas Roy, de Montréal, en 1879.
Il fut longtemps professeur de modelage de l’Association des Arts et Manufactures, à Montréal, et il devint vice-président de ce Conseil en 1898.
Sa nomination à l’Académie Royale Canadienne date de 1883. Le gouvernement canadien, en appréciation de son talent, lui a offert en 1894 la médaille de la Confédération. Il fut créé chevalier de la Légion d’Honneur en 1901, par la France; en 1903, compagnon de St-Michel et de St-Georges et chevalier de St-Grégoire le Grand.
Ses monuments les plus remarquables sont ceux de Maisonneuve, de l’hon. John Young, de Mgr Bourget, de Pierre Le Gardeur, d’Edouard VII, de Sir George E. Cartier, de l’hon. Alexander Mackenzie, de Sir John MacDonald, de la reine Victoria, à Montréal; de De Salaberry, à Chambly, de Mgr de Laval, à Québec et de Howe à Halifax. Les Parlements d’Ottawa et de Québec sont aussi ornés de nombreuses statues hsitoriques dues à son ciseau.
Monument Maisonneuve, place d’Armes, Montréal, QC, vers 1896. On voit ici Jeanne Mance et un enfant.
M. Hébert était malade depuis trois mois. Il est mort hier après-midi, à sa résidence, 309 avenue Elm. Il laisse deux filles et deux garçons, M. Henri, sculpteur et M. Adrien, peintre. Une autre de ses filles, Mlle Blanche, mourut il y a cinq ans; elle était mariée à M. Armand Martin, anciennement de la maison Révillon et Frères , aujourd’hui au front, dans le 163 régiment canadien-français.
Pour en savoir plus, voir le Répertoire du patrimoine culturel du Québec.
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