Un cercueil sur la rive [1892]

La Patrie, 23 mai 1892

« UN CERCUEIL SUR LA RIVE
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Etrange trouvaille à Saint Joseph de Sorel
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Un petit cadavre bien conservé
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A-t-il été emporté par la débâcle
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Mercredi dernier, MM. Pierre et Antoine Thibault, de l’Isle Saint-Ignace, qui étaient à pêcher à la senne, vis-à-vis de la « Pointe des Pins », à Saint Joseph de Sorel, aperçurent sur la grève une boîte qui attira leur attention et ils s’en approchèrent aussitôt. Cette boîte, d’une couple de pieds de longueur, était ouverte à sa partie supérieure et contenait le corps d’une enfant âgée d’à peu près un an et demi. Cette enfant ne portait aucune marque de violence, avait les mains jointes sur la poitrine et était ensevelie. Elle était bien conservée.

D’où venait-elle, qui l’avait ainsi exposée? Mystère que tout cela.

Il est probable, disent les uns, qu’elle venait des alentours de Montréal, où des parents très pauvres et sans coeur ni âme l’auraient, pour ne point payer les frais de funérailles, déposée sur la glace, et qu’elle aurait été emportée, lors de la débâcle, jusqu’à l’endroit où elle a été trouvée. D’autres prétendent qu’elle a dû être enlevée d’un charnier quelconque et que les détrousseurs, voyant que ce n’était le cadavre qu’ils voulaient, l’ont abandonné dans son cercueil sur la grève.

Quoi qu’il en soit, cette trouvaille est bien lugubre, et elle indique, quelque part, un bien triste état des choses.

M. le coroner Bondy a tenu une enquête jeudi soir, et le jury a rendu le verdict: Trouvée morte sur la grève, dans la paroisse de Saint-Joseph de Sorel.

Le petit cadavre a été inhumé dans le cimetière de cette paroisse. »

Note: cet article reprend celui publié dans Le Sorelois du 20 mai 1892 en y ajoutant quelques détails.

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«LES VAGUES QUI S’ÉLEVAIENT À UNE HAUTEUR PRODIGIEUSE» INONDATION À SOREL [AVRIL 1865]

LES ENLÈVEMENTS DE CADAVRES [1883]

DES OSSEMENTS RETROUVÉS À L’ANSE AU FOULON [1924]

LE MONUMENT DES IRLANDAIS [GROSSE-ÎLE, 15 AOÛT 1909]

«Les vagues qui s’élevaient à une hauteur prodigieuse» Inondation à Sorel [avril 1865]

Le 15 avril 1865, deux nouvelles faisaient la une: l’assassinat de Lincoln et l’inondation à Sorel. L’article qui suit porte sur l’inondation à Sorel et a été publié dans le journal Le Canadien, édition du 15 avril.

Print | Sorel, QC, about 1875 | MP-0000.1017.1

Sorel vers 1875

GRANDE INONDATION À SOREL

Nous empruntons les détails suivants à L’Echo du Richelieu et à la Gazette de Sorel.

Sorel, jeudi midi, 13 avril.

Depuis quelques jours l’eau avait atteint une hauteur qui faisait craindre beaucoup pour les propriétés situées dans le Chenal du Moine et les Iles avoisinantes. Partout les champs étaient devenus de véritables rivières; les cultivateurs n’entraient plus dans leurs maisons qu’à l’aide de canots; la plupart des familles s’étaient réfugiées dans les greniers des maisons, attendant là, avec patience, la fin de leur malheureux sort; les animaux avaient été relégués dans les greniers des granges, dont une grande partie avait déjà été atteinte par l’élément destructeur et menaçait de jour en jour et à la première forte brise, d’en devenir la proie! Ce jour, hélas! ne s’est pas fait attendre longtemps. Hier midi, une forte brise du Sud commença à souffler avec une violence qui fit craindre plusieurs personnes de la ville pour leurs bâtisses. Quelques bâtiments à voile mouillés à l’entrée de la rivière Richelieu, commençaient à descendre rapidement dans le fleuve, entraînés par le vent qui semblait ne vouloir rien épargner. Cependant, ces bâtiments purent tenir bon, un seul fut démâté, et les vagues qui s’élevaient à une hauteur prodigieuse l’eurent bientôt rempli. Deux jeunes gens laissés à la garde du bâtiment subirent une grande partie de la tempête, mais purent malgré tout, tenir le bâtiment à l’ancre jusqu’à ce qu’on vint à leur secours, et il était bien temps. A part quelques autres petites accidents plus ou moins sérieux, tels que pertes de bois, de hangars, etc, nous n’avons aucun malheur à déplorer dans notre ville.

Montants recueillis en faveur des victimes de l’inondation. La Gazette de Sorel, 29 avril 1865

Mais ce qui était le plus à craindre étaient les souffrances probables que devaient endurer les habitants des Iles de Grâce, Ile aux Ours et du Chenal du Moine, pendant que durait cette affreuse tempête.

En effet, vers dix heures du soir, des nouvelles arrivèrent en ville par l’équipage du propeller Bell, sous les ordres du Capt. Chs Armstrong qui se dévoua si bien en cette occasion, que toutes les maisons et granges des Iles et du Chenal du Moine disparaissaient devant la force de l’élément devenu de plus en plus impétueux. Aussitôt, M. Sincennes donna ordre d’équiper au plus tôt deux des steamers de la Compagnie du Richelieu pour aller au secours des malheureux qui, disait-on, perdaient les uns la vie, les autres leurs propriétés. Vers minuit, le vapeur Terrebonne, sous le commandement de l’habile capitaine Roy, se rendait à toute vapeur sur les lieux du désastre; il arrive à l’île de Grace, où le Cygne qui s’était rendu dans le cours de la journée, avait déjà à son bord grand nombre de personnes échappées au danger pendant la tempête.

A 2 heures, ce matin, l’Etoile se rendait, sous le commandement de l’actif capitaine Mathiot, au Chenal du Moine pour porter, s’il était encore possible, secours aux malheureux inondés de cette partie-là. Le Terrebonne revenait ce matin à 10 heures, le pavillon de détresse à son mât de derrière, et ayant avec lui ce qu’il restait des survivants des Iles de Grace et aux Ours, c’est-à-dire une quarantaine.

Les nouvelles étaient des plus alarmantes: toutes les maisons ou à peu près, avaient été enlevées; 20 ou 25 personnes en partie femmes et enfants avaient trouvé la mort au milieu des flots. Les granges contenant les animaux, moissons, etc., des cultivateurs étaient entièrement disparues. Quelques minutes plus tard, L’Etoile nous ramenait 150 et plus, des pauvres inondés du Chenal du Moine! Rien de plus navrant! ils se trouvent tous dans la plus grande détresse; à peine de quoi se vêtir! La plupart nu tête et nu pieds!

La ville se trouve dans la plus grande excitation! le clergé, les membres de la corporation, S. H. le juge Loranger, M. Sincennes et les premiers citoyens de la ville sont occupés activement à donner asile à ces pauvres gens! Dans ce moment, la plupart sont logés à l’Hôtel-de-Ville, plusieurs reçoivent l’hospitalité dans les maisons privées.

Les abords du quai de la compagnie du Richelieu ont été encombrés depuis ce matin.

Une liste des personnes décédées lors de l’inondation est publiée dans la Gazette de Sorel du 22 avril 1865

Le nombre des victimes de l’inondation actuellement ici est d’à-peu-près 250 à 300.

Un enfant seulement a été remporté mort; aucun autre n’a encore été retrouvé!

On nous raconte les plus beaux traits sur le courage des personnes qui ont employé toutes leurs ressources au sauvetage de ces malheureux.

DERNIERES NOUVELLES

2 heures P. M.
Une assemblée des citoyens convoqué par Son Honneur le Mair R. H. Kittson, Ecr, a eu lieu cette avant-midi au Palais de Justine; chacun a fait preuve d’une grande libéralité; dans l’espace de quelques minutes la souscription pour venir en aide à ces malheureuses victimes s’élevait à $1,620!

[…]

Dans le chenal du Moine il n’y a pas de pertes de vies à déplorer; le nombre des bâtisses enlevées était tant en maisons que grange s’élève à 60 ou 70; sur ce nombre 24 maisons. Un seul cultivateur du nom de Eno Millet a perdu 13 bâtiments. Il est impossible de dire au juste le nombre de bestiaux perdus, mais il est immense. Dans l’Ile de Grâce, le nombre des victimes, dit-on, est de 19 ou 20. Un nommé Paul Péloquin, cultivateur de l’Ile de Grâce, a perdu 4 de ses enfants et lui-même n’a dû son salut qu’à l’activité de ses sauveurs. Un nommé Etier de l’Ile de Grâce à vu périr sous ses yeux sa femme, sa belle-soeur et deux de ses enfants. Un autre, Joseph Lavallée de l’Ile de Grâce, s’était cramponné aux branches d’un arbre avec sa femme et 4 ou 5 de ses enfants, il y resté pendant 16 heures, ballotté en tout sens par la vague, il a vu périr un de ses enfants, mourir sa femme à ses côtés, et cependant il a conservé assez de force pour résister avec le reste de sa famille jusqu’à ce qu’on put venir à son secours.

[..]
BERTHIER- Les nouvelles qui nous viennent du  »Petit Nord » sont alarmantes, les bâtisses y ont été partout presqu’entièrement enlevées.

On nous dit qu’à l’Ile de Pads (Ile Dupas?) 17 personnes ont perdu la vie.

6 1/2 du soir

Le Terrebonne arrive d’une seconde expédition aux Iles; son pavillon de détresse flotte encore! Il remporte avec lui deux cadavres; celui de la femme de Joseph Lavalléee dont il est parlé plus haut et celui d’un petit enfant, aussi un grand nombre de bestiaux.

Que Dieu nous donne du courage et nous protège au milieu de tous ces désastres.

Pendant que le Cygne pouvait à peine se maintenir sur son ancre, le capitaine Labelle avec deux hommes, se jetaient résolument dans un canot et se dirigeaient à force de rame là où ils entendaient les cris des malheureux qui se noyaient.

Mais leur frêle embarcation résistait difficilement à la tempête; la lame emplissait le canot; ils atteignirent quelques arbres à l’abri desquels ils se mirent. Là se trouvait une jeune fille qui se soutenait d’une main aux branches d’un arbre et se maintenait au-dessus de la vague au moyen d’une cuvette avec laquelle elle avait pu atteindre cet endroit. Voyant arriver le canot, elle s’y précipita, mais ce nouveau poids faillit faire chavirer l’embarcation presque aux trois quarts remplie d’eau. La jeune fille saisit résolument la cuvette et pendant que les hommes retenaient le canot près des arbres, elle réussit à le vider.

Félicitations adressées au capt. Lavallée. La Gazette de Sorel, 6 mai 1865.

Un peu plus loin, une autre fille ayant deux jeunes enfants dans les bras, se maintenait, elle aussi, au milieu d’un arbre qui craquait sous les coups répétés d’un vent violent. Après trois heures de ces terribles angoisses, ces braves gens réussirent à rejoindre le Cygne. A part le capitaine Laforce qui risqua alors son bâtiment, pour porter secours aux naufragés et de ce que nous venons de raconter du capitaine Labelle, on nous dit que M. J. B. Lavallée, de Sorel, qui se trouvait à bord, déploya pendant tout ce temps un courage à toute épreuve et une grande présence d’esprit; sans le concours et l’expérience de cet homme courageux, il est probable que nous aurions à enregistrer la perte du Cygne et conséquemment à déplorer celle de plusieurs existences.

Les passagers des autres vapeurs recueillirent durant cette même nuit et toute la journée hier de nombreux naufragés, hommes, femmes et enfants qu’ils amenèrent à Sorel à demi morts d’angoisse et de misère.

Un nommé Lavallée dit Bloche avait vu sa maison s’écrouler sous les coups de la vague et il s’était jeté avec sa femme et 5 enfants ans un canot. Quelques minutes après, le canot se brisa sur les arbres. La pauvre mère saisit les branches d’un arbre et son mari parvint avec ses 5 enfants à un autre. Il se maintint là, un enfant sous chaque bras et les 3 autre auprès de lui pendant 16 heures. La femme épuisée de fatigues se noya sous ses yeux et un de ses enfants expira dans ses bras! Lorsqu’on les recueillit, les enfants étaient engourdis par le froid, mais dès que le père fut dans le canot, il saisit un aviron et il aida courageusement à gagner le vapeur à force de rames. Le corps de la pauvre dame a été repêché hier.

Voulez-vous encore quelque chose de plus saisissant? Lisez. Une pauvre femme était dans son lit à la veille d’accoucher. Le mari voyant que la tempête menaçait d’emporter la maison, demande à sa femme d’avoir le courage de se leve et de se rendre jusqu’au canot. Elle lui répondit:  »sauve-toi avec les enfants si tu peux; quant à moi, je comprends que c’est impossible; nous nous reverrons dans l’autre monde! » Et pendant qu’elle disait cela, la maison croula et tous furent précipités dans les flots! Ca n’est pas du roman que nous faisons; c’est la vérité toute nue que nous racontons. Ces choses se sont passées hier!…Mais c’est assez!

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Légende: la pénitence du prêtre-fantôme de l’Ile-Dupas

Le tremblement de terre du 20 octobre 1870

Tuée par une arche [Montréal, 27 juillet 1886]

En juin 1886, l’archevêque de Québec Elzéar-Alexandre Taschereau devient cardinal. Des célébrations sont organisées à Montréal, mais elles seront assombries par un décès.

Extrait de la Minerve, 28 juillet 1886
Un accident

est arrivé sur la place Jacques-Cartier, hier après-midi. Une foule considérable se pressait auprès de l’hôtel de ville pour voir passer le Cardinal, lorsque le ciel se couvrit tout-à-coup et la pluie se mit à tomber par torrent. Ce fut un sauve qui peut général. On cherchait un abri partout lorsqu’une dame assez âgée accompagnée de deux jeunes filles se réfugia auprès de l’arche élevée sur la Place Jacques-Cartier. Par une sorte de fatalité l’arche poussée par le vent s’abattit comme une avalanche et écrasa dans sa chute la plus âgée des dames et blessa légèrement les deux jeunes filles. On se hâte d’enlever les débris de l’arche mais la victime avait cessé de vivre.

Nous avons appris à regret que cette pauvre victime frappée si brusquement par la mort est madame (Narcisse) Vanasse, de Sorel, la mère de notre estimé confrère M. Vanasse du Sorelois.

Cet accident est d’autant plus regrettable que, à la construction de cette même arche dimanche, deux hommes ont été blessés grièvement et sont encore aujourd’hui à l’hôpital Notre Dame.

Le Sorelois du 30 juillet 1886 donne plus de détails sur la tragédie. Deux ans plus tard, la ville de Montréal fût condamnée à payer 1000$ pour le décès de madame Vanasse (née Françoise Bélanger) et 200$ pour les blessures de Marie Anne Rosalinde Cadorette, sa petite-fille. (La Minerve, 8 septembre 1888).

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Une histoire de bigamie [1869, St-Thomas de Pierreville]

En ce lendemain de la Saint-Valentin, voici une histoire tirée de la chronique des faits divers du Canadien.

2 juin 1869

CAS DE BIGAMIE: Il y a une dizaine de mois, un certain individu vint fixer sa résidence à St. Thomas de Pierreville. Il dit qu’il se nommait Gédéon Brindamour, et qu’il était un matelot français récemment arrivé au pays. Il se fit passer pour garçon et fréquenta une demoiselle Hamel, de St. Thomas. Quelques temps après il voulut l’épouser et il adressa à cet effet au Rév. M. Maureault, curé du lieu. M. Maurault s’objecta au mariage et demanda à Brindamour son affidavit pour établir qu’il n’était pas déjà marié, ce à quoi Brindamour consentit. Puis ce dernier alla aux Trois-Rivières afin d’obtenir de l’Evêque la dispense requise pour ne publier qu’un ban. Monseigneur Cooke demanda et obtint de Brindamour le même affidavit que celui-ci avait donné à M. le curé Maurault, puis il lui accorda la dispense demandée. Sur ce, M. Maurault célébra le mariage.

Quelques cinq ou six mois s’étaient à peine écoulés depuis lors, quand un mendiant qui passait par hasard à St. Thomas de Pierreville vit Brindamour. Le mendiant s’informa de lui et dit qu’il le connaissait bien, parce qu’ils étaient tous deux du même endroit. Il rapporta que Brindamour était de Charlesbourg, qu’il se nommait Joseph Pageotte et avait femme et enfants. Il rapporta que Brindamour avait eu de fréquentes difficultés avec ses voisins, au sujet de leurs terres, qu’il les avaient poursuivis en justice et s’était rendu remarquable par son amour de la chicane et de la tracasserie, qu’un bon jour Pageotte vendit sa terre et dit à sa femme qu’il partait pour les États-Unis; qu’il partit en effet et que depuis son départ on n’avait plus entendu parler de lui. Le mendiant ajouta que Pageotte était bien le même que celui qui disait se nommer Brindamour. Ces propos parvint aux oreilles de M. le curé Maurault, qui en écrivit sans tarder au curé de Charlesbourg. Celui-ci répondit que l’histoire du mendiant était vrai, et que l’individu en question pouvait bien être son paroissien Pageotte.

Enfin, de plus en plus convaincu que Brindamour l’avait trompé, le père de la femme no2 vint le dénoncer aux autorités de Sorel, qui le firent arrêter sous accusation de bigamie.

Le curé de Charlesbourg a été mandé et il a identifié Brindamour pour être le nommé Joseph Pageotte, son ancien paroissien.

Après examen préliminaire, Pageotte a été renvoyé aux prochaines assises de la Cour Criminelle, et enfermé dans la Prison Commune en attendant l’issue du procès.

L’épouse numéro 2 est Marguerite Hamel; l’acte de mariage est ici. Elle s’est remariée le 10 janvier 1871 à St-Thomas de Pierreville avec Louis Trial.

L’histoire ne dit pas si l’épouse numéro 1 a accepté de reprendre son mari au domicile conjugal…

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Peinture: James Peachey et le Bas-Canada en 1784-1785

Biographie

On sait peu de chose sur James Peachey avant sa venue en Amérique. Il est probablement né en Angleterre, mais en quelle année? Par contre, on sait qu’il faisait partie de l’armée britannique. C’est ce qui l’a amené au Bas-Canada où il a fait trois séjours entre 1773 et 1779 approximativement.

D’abord, entre 1773 et 1775, il est chargé à Québec de dessiner des levés pour Samuel Holland, ingénieur-topographe en chef des terres du Québec et du nord de l’Amérique du nord.

Son deuxième séjour à Québec débute en 1780. Encore une fois, il travaille auprès de Samuel Holland, mais cette fois en qualité de topographe-adjoint. A la fin des années 1780, il expose et publie certaines de ses oeuvres.

James Peachy revient en Amérique vers 1788. Il est alors enseigne au premier bataillon du 60e régiment d’infanterie. En 1790, on le retrouve à Montréal. Il continue d’être le topographe-adjoint de Samuel Holland. En 1793, il est transféré à Québec puis en 1794, à Halifax. Il aurait quitté définitivement le Canada en 1797 (Didier Prioul, p. 177)

Il est décédé le 24 novembre 1797 à La Martinique.

Oeuvres

Les oeuvres connues de James Peachey ont été réalisées entre 1774 et 1797. Il s’agit surtout de paysages qui

comptent parmi les premiers paysages exécutés au Canada. (réf )

Pourquoi cette prédilection pour les paysages? James Peachy était un militaire. Or,

Le dessin topographique faisait alors partie des études militaires et l’on enseignait aux cadets officiers à exécuter rapidement des croquis exacts de terrains et de bâtiments dont l’armée avait grand besoin avant l’avènement de la photographie ».  p. 244 Gilles Deschênes, p.244.

Didier Prioul, en commentant le tableau Vue de Montréal ( 1784)- tableau no11 dans la gallerie qui suit- écrit:

Un tel résultat affirme bien le topographe professionnel, bien au fait des conventions picturales. La vue à vol d’oiseau a intégré depuis longtemps la topographie militaire comme l’un des schémas de composition fondamentaux pour tracer le  »portrait » d’un lieu précis dans un rapport d’échelle avec son environnement. Tout un jeu de formulation vient ensuite se greffer sur ce premier substrat structure des voies de communications, nature, répartition et densité de l’habitat, reconnaissance des points névralgiques, etc . Ainsi, il ne faut pas accorder trop d’importance au premier plan. Didier Prioul, p. 178

Pour terminer, voyons maintenant comment James Peachey a immortalisé Sorel, Rivière-du-Loup, Québec, Montréal et bien d’autres villes sises sur les bords du fleuve Saint-Laurent. Les images qui suivent proviennent du site de Bibliothèque et Archives du Canada.

Bibliographie

James Marsch, l’Encyclopédien canadienne [en ligne] Peachey, James [Page consultée le 19 juin 2010] Adresse URL

Bibliothèque et Archives Canada [en ligne] James Peachey [Page consultée le 19 juin 2010] Adresse URL

Didier Prioul, article  »James Peachey » dans. Mario Béland, dir. La Peinture au Québec 1820-1850. Québec, Musée du Québec – Les Publications du Québec, 1991, 608 pages.

Gilles Deschênes. Quand le vent faisait tourner les moulins, Sillery, Septentrion, 2009, 314 pages.

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Le meurtre d’Achille Taché, seigneur de Kamouraska (31 janvier 1839)

Hier, tout Québec fut mis en émoi par le nouvelle du meurtre récent supposé de M. Achille Taché, Seigneur de la Seigneurie de Kamouraska. Les soupçons sont tombés sur un étranger, se disant de Sorel, qui était nouvellement arrivé à Kamouraska, et qui en est disparu depuis cet affreux événement.

Extrait: Le Canadien, 6 février 1839, p.2

***

Le 16 juillet 1834, à Québec, Josephine-Éléonore d’Estimauville épouse Louis-Paschal-Achille Taché, seigneur de Kamouraska. Deux enfants naissent de cette union malheureuse. Violence conjugale, abus d’alcool et autres comportements de la part de l’époux sont des facteurs qui incitent Josephine-Éléonore d’Estimauville à quitter Kamouraska avec ses enfants en décembre 1837. Elle s’établit à Sorel (appelé alors William Henry), chez sa mère. Son troisième enfant naît là. Son époux vient la rejoindre en janvier 1838, mais repart sans elle.

3 février 1839: on retrouve le corps de Louis-Paschal-Achille Taché à l’anse Saint-Denis (Kamouraska ) . Il est décédé de façon violente: deux coups de pistolets à la tête. Que s’est-il passé?

A Sorel, Josephine-Éléonore d’Estimauville a fait la connaissance du docteur Georges Holmes. Ils sont devenus amants. Taché et Holmes se connaissent; ils ont été confrères de classe au collège de Nicolet.

Avec ou sans le consentement de Josephine-Éléonore, Georges Holmes décide de se débarrasser du mari. Les premiers essais sont infructueux.

À l’automne de 1838, à deux reprises il essaya vainement d’envoyer quelqu’un à Kamouraska afin d’empoisonner le seigneur avec de l’arsenic. Il s’adressa ensuite à Aurélie Prévost, dit Tremblay, domestique au service de Joséphine-Éléonore et complice de leur liaison depuis le début. Aurélie s’installa dans une auberge de Kamouraska sous un faux nom. Le 4 janvier 1839, elle réussit à faire boire le poison à Taché, mais il n’en mourut pas. ‘(Réf).

Le 31 janvier 1839, Georges Holmes tue Louis-Paschal-Achille Taché. Il est suspecté dès la découverte du corps. Il a par contre eu le temps de s’enfuir aux États-Unis. Dans des lettres envoyés à deux amis, il avoue avoir tué Taché. (Réf 1 et Réf 2). Il est arrêté à Burlington, Vermont et mis en prison.

Josephine-Éléonore d’Estimauville est quant à elle arrêtée en février 1839 pour sa complicité dans l’affaire. Elle est libérée le 27 février. Son procès s’ouvre à Québec le 21 septembre 1841. Elle est accusée  »d’avoir administrés ou fait administrer un poison, soit une once d’arsenic blanc, dissout dans du brandy, à Achille Taché, le 4 janvier 1839.  » (Réf). Elle est déclarée non-coupable.

Josephine-Éléonore d’Estimauville est décédée en juin 1893 à Montréal. Elle a convolé en secondes noces en 1843 avec le notaire Léon-Charles Clément (six enfants). Ils vécurent aux Éboulements. Quant à Georges Holmes, il s’est enfuit aux États-Unis. Le Bas-Canada a demandé son extradition, ce qui a été refusé. Il a été libéré. On ne sait pas ce qu’il est devenu par la suite.

Compléments

Photographie d’Eleanore d’Estimauville, non datée (années 1870?) source: BANQ

Retranscription de l’acte de sépulture de Paschal-Achille Taché ici.

Bibliothèque et Archives nationales du Québec conserve certaines pièces relativement au procès de Georges Holmes, mais on ne peut les consulter en ligne.

Le drame de Kamouraska a inspiré deux livres: Drames de la vie réelle, roman canadien (Georges-Isodore Barthes, 1896) et Kamouraska (Anne Hébert, 1970). Du livre d’Anne Hébert est tiré le film du même nom (Claude Jutra, 1973). Souvenances Abbé Casgrain. Pierre-Georges Roy a tracé un Portrait de la famille Taché en 1904.

Anne Hébert et Paschal-Achille Taché partagent un lien de parenté, que l’on peut voir via le site Nos origines. Entrez les numéro 452853 et 116873.

***

Bibliographie

Celine Cyr, [En ligne]ESTIMAUVILLE, JOSÉPHINE-ÉLÉONORE D’ (Taché; Clément) Page consultée le 8 mai 2010: Adresse URL

Sylvio Leblond, «le Drame de Kamouraska d’après les documents de l’époque», Cahiers des Dix, 37 (1972): 239–273. reproduit dans Nos Origines. Adresse URL

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