Robert Chambers, le dernier maire anglophone de Québec (1809-1886)

Régis Labeaume est le 37e maire qu’a connu la ville de Québec (voir liste des maires). Aujourd’hui, je vais vous présenter brièvement le 17e homme à occuper cette fonction, Robert Chambers.

Formation

Robert Chambers est né à Hull le 17 mars 1809. Il apprend le métier d’avocat auprès de maitre Hector-Siméon Huot, à Québec et est reçu au barreau le 14 juin 1834. Il va pratiquer le droit à Québec pendant près de 50 ans.

Robert Chambers / Livernois Québec . -V. 1860 Source: BANQ.

Robert Chambers / Livernois Québec . -V. 1860 Source: BANQ.

Un scandale

Peu de temps après son entrée au barreau, plusieurs procès (meurtre, vols) sont intentés contre Charles Chambers, marchand de bois, habitant lui aussi Québec. Reconnu coupable de vol  chez une dame Montgomery en 1837, Charles condamné à mort. Cette sentence est commuée en  déportation. Pour en savoir plus sur cette affaire, consultez les billets suivants: La bande à Chambers 1, 2, 3 et 4 et La déportation d’après les registres d’écrous des prisons de Québec (Bas-Canada, 19e siècle). Certaines sources affirment que Robert et Charles sont frères. Selon mes recherches, ils s’agissaient peut-être de cousins, mais pas de frères.

La même année paraît  Révélations du crime de Cambray et ses complices qui relatent les crimes de la bande de Charles Chambers. Cet écrit est l’oeuvre d’un confrère de Robert Chambers, François-Réal Angers. Chambers devient ici Cambray, peut-être pour

ne pas nuire à la réputation du frère de Charles Chambers, l’avocat Robert Chambers, qui jouissait d’une réputation fort honorable. (Les Révélations du crime ou Cambray et ses complices, Editions Nota Bene, 2003,p.6 présentation de Gilles Dorion).

Une carrière en politique

Malgré le scandale, Robert Chambers parvient à exercer son métier d’avocat et à garder l’estime de ses concitoyens. En 1872, il est élu échevin du quartier Jacques-Cartier. Il siège sur plusieurs comité (chemin, finances, de la Traverse et des règlements) et est nommé pro-maire en 1876-1877. En 1878, il devient maire de Québec, poste qu’il occupera pendant deux ans.

Peu de temps après son entrée en fonction, il fait face à une sérieuse crise. Des hommes engagés pour construire des édifices pour le gouvernement ont voulu réclamer une augmentation de salaire. Le gouvernement leur en a offert une, augmentation qui a été refusée. S’en est suivi de la casse. Le premier ministre Henri-Gustave Joly de Lotbinière a même été attaqué. La situation s’est envenimée et Chambers a dû proclamer la loi sur l’émeute. Pour un récit plus complet des événements, je vous réfère à l’article Québec au printemps 1878: crise constitutionnelle et émeute communiste – Une page reléguée aux oubliettes de l’histoire paru dans le Devoir.

Aussi, au cours de son mandat, on note l’inauguration de la terrasse Dufferin, le 9 juin 1879. On peut voir quelques gravures représentant l’événement dans le journal L’Opinion publique (cliquez ici, puis sélectionnez 26 juin 1879).

Inauguration de la terrasse Dufferin, Québec, 1879. Album de la Princesse Louise. Source: Bibliothèque et Archives Canada

Inauguration de la terrasse Dufferin, Québec, 1879. Album de la Princesse Louise. Source: Bibliothèque et Archives Canada

Robert Chambers s’est retiré de la vie publique en 1880 et il est décédé le 1er janvier 1886.

Bibliographie

Louis-Marie Côté. Les maires de la vieille capitale. Québec, Société historique de Québec, 1980, 122 pages. Adresse URL

Pierre-Georges Roy. Les avocats de la région de Québec, Lévis, Le Quotidien, 1936, 566 pages . Adresse URL

Billet reliés

Photographies de Québec (1886-1910) par Frederick C. Würtele

Frederick Würtele est un photographe amateur qui a pris plusieurs clichés de la ville de Québec entre 1886 et 1910. Retraçons d’abord les grandes lignes de sa vie pour ensuite nous pencher sur son oeuvre.

Biographie

Quartier Vieux-Québec-Basse-Ville - Rue Sous-le-Cap / Fred C. Würtele . - septembre 1902 Source: BANQ

Quartier Vieux-Québec-Basse-Ville – Rue Sous-le-Cap / Fred C. Würtele . – septembre 1902 Source: BANQ

Frederick Christian Würtele est né le 10 septembre 1842 à Québec. Il était l’époux d’Élizabeth Riddle (quatre enfants).

Il a reçu son diplôme de l’école militaire en 1867, puis il a obtenu le grade de capitaine des Royal Rifles en 1883. Würtele a fait carrière en tant que comptable, mais il a aussi travaillé entre 1870 et 1890 pour son frère et son père, deux marchands de quincaillerie et de fer. Il a été secrétaire-trésorier du High School of Québec en 1892 et de la Protestant Board of School Commissioners (1897-1920). Il est nommé Esquire en 1891. Entre 1877 et 1906, il a occupé presque sans interruption diverses fonctions à la Québec Literary and Historical Society (conservateur des objets et bibliothécaire). Entre 1910 et 1914, il a été secrétaire de l’Archeological Institute of America, Department of Canada, Québec Society.

Frederick Würtele est décédé à Québec le 18 mars 1920.

Un intérêt certain pour l’histoire

Historien, il a publié quelques écrits:

Il a édité Blockade of Québec in 1775-1776 by the American Revolutionists en 1905-1906.
Ses photographies

Les thèmes représentés par les photographies du Fonds Fred. C Würtele sont variés: vues d’ensemble, bateaux, l’histoire, l’architecture, aspect militaire, les églises protestantes, les paysages, l’hiver, les moulins à scie, les institutions d’enseignement,  les ponts et les portraits. (Réf. Fernand Caron, p. 18) Il a croqué sur le vif les conséquences des éboulis de septembre 1889 à Québec, de l’effondrement du pont de Québec en 1908, de la destruction de la tour Martello no3  pour l’agrandissement de l’ancien Jeffery Hale (un hôpital de Québec) en 1904,  etc.

Il a surtout photographié Québec et ses environs. Commme la écrit Fernand Caron, dans Fred C. Würtele, photogaphe ,Würtele:

photographie, à l’instar des touristes, les particularités de la ville tels le Vieux-Québec, les environs du Parlement ou bien la rue Saint-Pierre. (p.10)

Quartier Saint-Jean-Baptiste - Boulevard Saint-Cyrille Est - Tour Martello - Numéro 3 / Fred C. Würtele . - août 1904 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Quartier Saint-Jean-Baptiste – Boulevard Saint-Cyrille Est – Tour Martello – Numéro 3 / Fred C. Würtele . – août 1904 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Il nous a donné de superbes vues de Québec comme cette photographie prise du toit de la Banque Union et qui montre la rue Saint-Pierre (voir photographie suivante).

Dans l’ensemble, cependant, il a tracé un remarquable tableau de la ville de Québec qu’il sentait évoluer avec inquiétude. Cette affirmation n’est pas gratuite, compte tenu des nombreuses photos de démolitions et d’immeubles qu’ils nous a léguées. (Réf. p.11, Fernand Caron)

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A Québec, il a immortalisé le Morrin College, le Collège des Jésuites, le Marché Champlain, les plaines d’Abraham, le bureau de poste (et sa célèbre plaque du Chien d’or), le Capitole, les Jardins du Gouverneur, la rue Sous-le-Cap, le Bassin Louise, le Château Frontenac, la Grande-Allée, la Terrasse Dufferin, le quartier Saint-Roch, le quartier Latin, l’Esplanade, Place d’Armes, l’Hôtel de ville, et bien plus.

Voici quelques endroits qu’il a photographié: outre Québec, il y a Chicoutimi, Ottawa, Rivière-du-Loup, l’Ile d’Orléans, Chambly, Grand-Mère, Saint-Tite, Boischatel, Trois-Rivières, Saint-Romuald, Saint-André (Lac-Saint-Jean), Lennoxville (Sherbrooke), Toronto, Ottawa, Tewkesbury, Rivière-Ouelle, Lévis, etc.

Voici d’autres photographies:

Quartier Cap-Blanc - Rue Champlain - Catastrophe / Fred C. Würtele . - septembre 1889 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Quartier Cap-Blanc – Rue Champlain – Catastrophe / Fred C. Würtele . – septembre 1889 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

 

Beauport - Avenue Royale / Fred C. Würtele . - octobre 1897 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Beauport – Avenue Royale / Fred C. Würtele . – octobre 1897 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Le fonds Fred. C. Würtele contient plus de 575 photographies et il peut être vu presqu’entièrement en ligne sur le site de BANQ. Pour voir ces photos, allez sur Pistard, entrez le mot-clé de votre choix, cliquez sur Documents numérisés et validez. Sélectionnez ensuite Fonds Fred Würtele.  Des photographies sont aussi disponibles sur cybermuse.

Conclusion

Les photographies qui sont l’oeuvre de Fred Würtele constituent un témoignage intéressant sur la ville de Québec et ses environs à l’aube du 20e siècle. Elles mettent en valeur le patrimoine bâti, religieux et maritime du Québec. Ses photographies et ses diverses fonctions montrent à quel point il avait à coeur l’histoire et le patrimoine de Québec.

Sainte-Pétronille-de-l’Île-d’Orléans - Camp d'entraînements de l'Artillerie royale canadienne / Fred C. Würtele . - août 1904 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Sainte-Pétronille-de-l’Île-d’Orléans – Camp d’entraînements de l’Artillerie royale canadienne / Fred C. Würtele . – août 1904 Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Bibliographie

CARON, Fernand. Fred C. Würtele, photogaphe.Ministère des Affaires culturelles, 1977, 276 pages.

Billes reliés

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Le château disparu (Château Saint-Louis à Québec)

Avant le Château Frontenac, à Québec, il y a eu le château Saint-Louis, résidence des gouverneurs et lieu de rencontre de la haute société. Voyons brièvement l’histoire de ce château dont les derniers vestiges sont enfouis sous la terrasse Dufferin.

La résidence du gouverneur

Premier Château Saint-Louis Source: GAGNON, Ernest. Le fort et le Château Saint-Louis: étude archéologique et historique. p.21

Le premier château Saint-Louis (nommé en l’honneur du roi Louis XIII) a été construit en 1647 à l’instigation de Charles Huault de Montmagny, gouverneur de la Nouvelle-France. Ce bâtiment a servi jusqu’en 1834 de résidence pour le gouverneur.

Il s’agit d’un bâtiment de pierre d’un seul étage de 26,2 mètres sur 7,3 mètres, surmonté d’un toit en bardeau. Cet édifice sera agrandi au début des années 1680

(Réf).

L’édifice est reconstruit dès 1694 à la demande de Louis de Buade, comte de Frontenac.

Si la situation pittorsque de la ville avait séduit l’illustre gouverneur dès le début dès le commencement de son premier séjour dans la Nouvelle-France, il en fut autrement de la résidence officielle qu’il devait habiter -le Château Saint-Louis,- qu’il trouva en fort mauvais état, et dont il se plaignit en toute occasion.

(Réf. p.40 )

Plans et élévations du château Saint-Louis en 1724 par Chaussegros de Léry Source: Wikipédia

Le deuxième château sera beaucoup plus imposant que son prédécesseur. Il y aura des travaux jusqu’en 1723, sous le mandat du Pierre de Rigaud, Marquis de Vaudreuil.

Il est prévu que l’édifice fasse plus de 36 mètres de long, ait deux étages, comporte un avant-corps central et deux pavillons (un à chaque extrémité de l’édifice), le tout recouvert d’un toit en ardoise

(Réf).

L’édifice est abîmé durant les bombardements de 1759. Des rénovations seront entreprises au cours des années suivantes. Le château est agrandi et on lui ajoute un étage en 1808-1811. Il brûle le 23 janvier 1834.

Un mariage et un enterrement

Le château a été le théâtre d’un mariage, le 30 août 1797, celui de Rebecca Prescott (fille du gouverneur-général Robert Prescott) et du capitaine John Baldwin. Hélas, la mariée est décédée à Québec quelques mois plus tard…

Le château quelques années avant sa démolition

Voici un dernier témoignage décrivant le château.

Les édifices publics [de Québec] sont le château Saint-Louis, l’Hôtel-Dieu, le couvent des Ursulines, le monastère des Jésuites, actuellement converti en casernes, les cathédrales protestante et catholique, l’église écossaise, l’église de la basse-ville, la maison de Justice, le séminaire, la nouvelle prison, et les casernes de l’artillerie; il y a deux marchés, une place d’armes, une parade et une esplanade. De ces bâtiments, le château Saint-Louis étant l’objet le plus saillant sur le sommet du rocher, mérite le premier d’être remarqué; c’est un beau bâtiment de pierre, situé près du bord d’un précipice d’un peu plus de deux cents pieds de hauteur, et soutenu de ce côté par un ouvrage solide en maçonnerie, qui s’élève jusqu’à la moitié de l’édifice, et surmonté d’une galerie spacieuse d’où l’on a une vue très imposante du bassin, de l’Ile d’Orléans, de la Pointe-Lévi, et du pays d’alentour. Le bâtiment a en totalité 162 pieds de long sur 45 de large; il a trois étages mais du côté du Cap il paraît beaucoup plus haut: chaque extrémité est terminée par une aile qui donne au tout ensemble un air libre et régulier; la distribution intérieure est commode, les décorations sont pleines de goût et magnifiques, et convenables à tous les égards à la résidence du Gouverneur Général. Il fut bâti peu après que la ville eût été fortifiée par des ouvrages réguliers, par conséquent il offre assez peu de beautés qui puissent attirer l’attention; pendant une longue suite d’années il fut négligé au point qu’on le laissa dépérir, et cessant d’être la résidence du commandant en chef, il ne servit plus qu’aux bureaux du gouvernement, jusqu’en 1808, alors que le parlement provincial adopta une résolution pour le réparer et l’embellir […].

(Réf. Joseph Bouchette, en 1815, dans Description topographique de la province du Bas-Canada, cité par Ernest Gagnon p. 202 et 204.)

Le château Saint-Louis Source: Ernest Gagnon, p. 203

De nos jours…

A l’endroit où s’élevait jadis le château Saint-Louis se trouve maintenant la terrasse Dufferin.

Entre 2005 et 2007, des fouilles archéologiques ont eu lieu. Le public a pu visiter le site dans le cadre des fêtes du 400e anniversaire de Québec en 2008.

Le Lieu historique national du Canada des Forts-et-Châteaux- Saint-Louis (désigné en 2001) englobe les vestiges des deux châteaux Saint-Louis, des quatre forts Saint-Louis et des jardins.

Les vestiges du fort et du Château Saint-Louis (2008) Crédits: Vicky Lapointe

Bibliographie

GAGNON, Ernest. Le fort et le château Saint-Louis (Québec): étude archéologique et historique. Librairie Beauchemin, Montréal, 1908, 284 pages. Adresse URL: http://www.archive.org/details/lefortetlechatea00gagn

GUIMOND, Jacques. [En ligne] Forts et châteaux Saint-Louis [Page consultée le 3 avril 2010] Adresse URL:http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-263/Forts_et_ch%C3%A2teaux_Saint-Louis_%28Qu%C3%A9bec%29.html

Parcs Canada [En ligne] Lieu historique national du Canada des Forts-et-Château-Saint-Louis Structure et aménagements et forts et châteaux [Page consultée le 3 avril 2010] Adresse URL: http://www.pc.gc.ca/fra/lhn-nhs/qc/saintlouisforts/natcul/natcul3.aspx

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