L’incendie du théâtre Saint-Louis [Québec, 12 juin 1846]

Le Canadien, 6 juin 1846

L’artiste Mark Robert Harrison s’est amené à Québec en juin 1846 pour présenter ses dioramas. Un diorama c’est, selon le Larousse, une  »grande peinture sur toile présentée dans une salle obscure afin de donner l’illusion, grâce à des jeux de lumière, de la réalité et du mouvement. Le procédé avait été inventé par Louis Daguerre et Charles Marie Bouton. À la fin de ce billet, vous trouverez une vidéo montrant des dioramas.

Voici ce qui s’est passé à Québec le 12 juin 1846, tel que rapporté dans Le Canadien du 15 juin 1846.

Québec est bien la ville des désastres, des douleurs et des afflictions. Il y a à peine une année que nous avions à déplorer l’incendie du faubourg St. Roch de notre cité, aujourd’hui nous avons à enregistrer un désastre plus épouvantable encore sous le rapport du nombre considérable de nos concitoyens qui en ont été les déplorables victimes. Vendredi au soir, l’exhibition des dioramas chimiques dans la salle du théâtre St. Louis (ancien manège) venait de finir, quand le feu se communiqua du rideau aux toiles peintes à l’huile, au moment où les nombreux spectateurs commençaient à se retirer. Au premier cri de Au feu! la salle fut, en un moment, dans un trouble et une confusion indicibles. La foule se porta en masse vers la seule issue qui conduisait à la porte extérieure; et dans la précipitation qui s’en suivit, un grand nombre de personnes étant tombées, celles qui les suivaient vinrent augmenter le monceau vivant qui s’était formé entre l’escalier conduisant du théâtre et la porte extérieure, et fermer ainsi tout espoir de salut aux malheureux entassés les uns sur les autres. Malgré les efforts et les prompts secours donnés par les citoyens appelés sur le lieu du sinistre, nous avons à déplorer la perte de plus de quarante quatre de nos concitoyens. Il nous a été impossible jusqu’à cette heure de nous procurer des informations exactes cependant nous nous empressons de donner les noms des victimes dont les cadavres ont été reconnus par leurs parents et amis.

  • Horatio Carwell, marchand
  • Horatio Carwell, âgé de 6 ans, ses enfants
  • Ann Carwell âgée de 6 ans, ses enfants
  • Joseph Tardif
  • Olivette Fiset, son épouse
  • Sarah Darah, épouse de John Calvin, charretier
  • James O’Leary, apprenti plâtrier, âgé de 22 ans
  • Mary O’Leary, soeur du précédent, âgée de 18 ans
  • J. J. Sims, apothicaire
  • Rebecca, 23 ans, ses enfants
  • Kennith, 13 ans, ses enfants
  • Mary O’Brien,  âgée de 26 ans, femme de John Lilly, tailleur
  • J.-Bte Vézina, marchand, âgée de 30 ans
  • Henriette Glackemeyer, épouse de T.F. Molt
  • Frederick, 19 ans, fils du précédent
  • Adophus, 12 ans, fils du précédent
  • Helen Murphy, âgée de 20 ans
  • Emmeline Worth, âgée de 9 ans, fille de Edward Worth, de Montréal, et soeur de Mme Abraham Lenfesty de Québec
  • Flavien Sauvageau, musicien, fils de M. Chs Sauvageau, âgé de 14 ans
  • Elizabeth Lindsay, épouse de Thos.  Atkins, clerc du marché de la Haute-ville, âgée de 53 ans.
  • Richard Atkins, âgée de 27 ans, fils du précédent
  • Stewart Scott, écuyer, greffier de la cour d’appel
  • Jane Scott, sa fille
  • John Wheatley, libraire-papetier
  • Thomas Hamilton, écuyer, lieutenant dans le 15e régiment
  • Julia Rae, âgée de 16 ans, fille du député-assistant-commissaire-général (Note: fiancée du précédent?)
  • Madame John Gibb et Jane Gibb sa fille
  • Arthur Lane, fils d’Elisa Lane, de la maison de Gibb, Lane & Co
  • Mary Ann Brown, institutrice à Wolfe’s Cove, âgée de 25 ans
  • Madame Marie Louise Lavallée, épouse de R. McDonald, écuyer, rédacteur du Canadien
  • Eugénie McDonald, fille du précédent et épouse de Rigobert Angers
  • Edouard R. Hoggs, teneur de livre de la banque de Montréal
  • John, âgé de 8 ans, fils du précédent
  • Édouard, âgé de 6 ans, fils du précédent
  • Thomas C. Harrison, âgée de 21 ans, de Hamilton, Canada  Ouest, frère de l’artiste qui exhibait les dioramas
  • Joseph Marcoux, huissier
  • Ann  Taffe, servante, de M. Denholm, écuyer, âgée de 19 ans
  • John Smith, fils de John Kane, ferblantier, âgé de 11 ans
  • Colin Ross, âgé de 26 ans, plâtrier de Montréal, natif d’Inverness en Écosse
  • Agnès Black épouse du précédent et fille de la veuve Black de Montréal, âgée de 18 ans
  • Isaac Develin, horloger
  • John Barry, d’Aberdeen, dernièrement employé de la maison W. Price et cie, récemment arrivé à Québec de Chicoutimi, le 8 du courant; trouvé sur sa personne partie d’une lettre signée James Barry avec l’adresse de Barry, Gairdner et Riddel, market north, Bradford, Aberdeen
  • Emilie Ponsy, soeur des demoiselles Ponsy tenant maison de pension
  • M. McHuge, instituteur de La Malbaie
La perte immobilière est peu considérable et se borne au théâtre et aux écuries qui l’avoisinaient. Les fouilles, au moment où nous écrivons, continuent dans les décombres et on nous informe qu’ils renferment encore plusieurs cadavres.

Marc-Aurèle Plamondon a aussi relaté cette tragédie en 1848 dans le Répertoire national ou Recueil de littérature canadienne, volume 3. À noter qu’il dit qu’il était à la représentation.

Et pour terminer, voici une vidéo où l’on voit des dioramas.

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