Le général Tom Pouce à Québec [juillet 1848]

Extrait du Canadien, 24 juillet 1848

Le général Tom Pouce n’était pas un militaire, mais plutôt un artiste de à scène. De son vrai nom Charles Sherwood Stratton, Tom Pouce né en 1838 à Bridgeport, Connecticut. En 1848, il était à Québec pour faire démonstration de ses talents de chanteur, d’acrobate et d’imitateur. C’était un nain. Selon l’affiche de son spectacle, il mesurait 28 pouces de hauteur.

Pour inciter les gens à aller voir le spectacle, on a bien sûr publié dans les journaux des publicités, comme celle que l’on voit ci-contre.

Tom Pouce a même fait une apparition dans les bureaux du journal Le Canadien. Voici ce que cela a donné:

Extrait du Canadien, 26 juillet 1848

LE GENERAL TOM POUCE

Les rédacteurs de journaux jouissent, nous l’avons déjà dit, de quelques privilèges qui, heureusement, viennent les consoler de leur ingrate vocation. Hier matin, comme nous étions gravement assis sur notre fauteuil éditorial, méditant sur les tristes vicissitudes que la politique doit aux ambitions personnelles de ceux la veulent diriger, sur la réforme électorale, sur les chiffres de certains journaux et sur mille autres sujets aussi peu récréatifs, nous vîmes entrer un monsieur portant un petit paquet, enveloppé d’un foulard, qu’il posa par terre. Nous n’y portâmes pas d’abord grande attention, attendant que l’étranger nous eût expliqué l’objet de sa visite. Il nous annonça alors l’arrivée du général TOM POUCE que nous ne suppositions pas alors si près de nous, et que nous fûmes fort surpris de voir sortir de dessous le mouchoir de poche, vêtu de noir avec la dernière élégance, tout botté, jabotté, couvert de bijoux et sautillant, tournant sur les talons comme un merveilleux du bois de Boulogne. Tom Pouce, qui s’introduisit lui-même, est certainement l’un des plus grands phénomènes d’exiguité qu’on ait vus à Québec et probablement dans le monde entier. Parfaitement proportionné, doué de manières enjouées, parlant anglais et français, comprenant l’espagnol, chant, dansant, exécutant plusieurs scènes mimiques avec beaucoup d’aplomb et de finesse, il finit par vous faire croire qu’il est de taille ordinaire, et l’illusion ne finit que lorsque, replacé à terre, vous le voyez fuir entre les bancs où vous le perdez de vue et sous lesquels il s’échappe se baissant un peu. Tom Pouce est depuis hier le  lion à la mode; la foule s’est portée de plus en plus nombreuse à ses trois séances, et chose unique, tout le monde en sortant déclare que les promesses de l’affiche sont fort au-dessous de la réalité.

Tom Pouce par Matthew B. Brady [entre 1844 et 1860] Source: Library of Congress

Il n’est plus possible de sortir sans être accosté par quelqu’un de ses admirateurs et surtout de ses admiratrices qui vous demandent: Avez-vous vu Tom Pouce ? Tom Pouce a remplacé fort à propos pour quelques jours dans la conversation, la température, la réforme électorale, les discussions sur l’annexion, la conduite des membres du parlement et autres sujets pleins d’actualité mais devenus fatigants. Tom Pouce est le plus petit des grands. A coup sûr, il est à présent le plus aimable.

Le 28 juillet, on ajoute dans le Canadien

Charles Sherwood Stratton, aka General Tom Thumb, daguerréotype vers 1848. Source: Wikipédia et Metropolitan Museum of Art

Que ceux qui veulent voir ce phénomène d’exiguité se hâtent donc de profiter des courts instants  que le spirituel petit Poucet doit passer parmi nous. Il est d’autant plus curieux de voir une telle intelligence dans un si petit être, qu’on voit tant de gros personnages en avoir si peu.

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